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Popularisation de l’art et de la culture : A la découverte du concept « Sougou Taa L’H »

mardi 26 septembre 2017, par Assane Koné

Engagés dans des actions volontaristes de popularisation de l’accès à l’art et à la culture, le Centr’Art Don Sen Folo et l’AMMCDR, ne manquent pas d’initiatives. En collaboration avec des artistes comme Bocar Dembélé dit Bouba (danseur), Moussa Fomba (comédien), Daouda Keita (danseur), Sékou Dembélé (percussionniste), Yacouba Coulibaly (danseur),King Massassy (Artiste photographe), les responsables du Centr’Art Don Sen Folo et de l’AMMCDR, que sont Lassine Koné et Yacouba Magassouba, du 20 au 25 septembre 2017, viennent d’initier un nouveau concept de prestation artistique : « Sougou Taa L’H » ou l’heure du marché.

La mise en œuvre de ce concept ou l’exécution de la phase pratique du concept a eu lieu du 20 au 25 septembre 2017, dans trois marchés de 2 communes du District de Bamako et une commune de Kati : Marché de Banakabougou, Marché de Badalabougou et le Marché de Kalaban-Coro.

Démarré le 20 septembre 2017, par une prestation de 10 à 15 mn au Marché de Kalaban-Coro ; le « Sougou Taa L’H » a eu lieu le 23 septembre 2017, au Marché de Banakabougou et le 25 septembre 2017, au Marché de Badalabougou. Nous avons eu la chance d’être parmi les privilégiés qui ont pu voir le « Sougou Taa L’H » du Marché de Banakabougou.

« Sougou Taa L’H » est une prestation artistique improvisée dans un marché, au moment où les femmes, clientes et vendeuses, marchandent. Ici, point de loge. Le Coin d’une ruelle et derrière le véhicule d’une dame venue sûrement faire son marché, suffisent aux artistes pour se départir de leurs habits de tous les jours, pour se mettre dans le costume du spectacle. En réalité, pour la prestation du marché de Banakabougou, c’est plutôt le marionnettiste Yacouba Magassouba de la Compagnie Nama qui vient de remporter la médaille d’Argent aux 8e Jeux de la Francophonie à Abidjan, qui a eu vraiment besoin de quelques minutes pour sortir ses marionnettes de son gros sac noir qu’il portait incognito sur son dos.

Et, pendant ces quelques minutes, à regarder le visage des femmes dans leur environnement immédiat, l’on pouvait aisément imaginer les questions qui se bousculeraient sur leurs lèvres, si elles avaient l’occasion de les poser. Qui sont-t-ils ? Que font-t-ils ? Mais, pourquoi subitement cette demi douzaine de personnes s’arrêtent et s’attroupent en ce lieux précis ?

A la vue de la marionnette grandeur nature dénommée « Mêrin » qui représente une belle femme peulh, dans ses plus beaux habitats pour aller faire le marché, l’inquiétude momentanée disparaît de tous les visages inquisiteurs, pour faire place à des larges sourires. « Ha ha ha, ce sont des artistes. Nous allons voir un spectacle », lance une vendeuse qui se joue le rôle d’un imprésario pour la troupe.

Loin des salles de spectacles, qui ne font pas partie de leurs univers et souvent trop cloîtrées dans les marchés du matin au soir, n’ayant pratiquement pas le temps pour s’adonner à une autre activité, comme aller voir un spectacle, les femmes du Marché de Banakabougou, ont été émerveillées par ce qu’elles ont vu.

Dans un texte dit en bamanakan (langue la plus usitée dans ce marché et un peu partout au Mali), le Comédien Moussa Fomba a campé le décor. Avec une voix forte à la manière des crieurs publics, il a posé, dans un bambara limpide, la problématique de l’avenir de nos us et coutumes, au regard de ce phénomène d’acculturation généralisée qui s’infiltre dans tous nos foyer, dans nos villes, même dans nos villages les plus reculés. Au fur à mesure que la scène de spectacle se déplaçait dans l’artère du marché, le comédien à l’allure d’un conteur s’attirait la sympathie des spectatrices qui appréciaient sa diction.

Comme s’ils n’attendaient que cette voix de Moussa Fomba, comme un top départ. Trois danseurs (Lassine Koné, Bocar Dembélé et Yacouba Coulibaly) se lancent dans une ruelle du marché, suivis de deux marionnettistes. Et, c’est parti pour un spectacle de 10 à 15 minutes non stop, qui allie la poésie, conte, la danse contemporaine et la prestation des marionnettes. Et, comme la scène (le marché) était déjà envahie par d’autres acteurs (commerçants et acheteurs), et même par moment, par de simples flâneurs, les spectateurs étaient tout trouvés. Mais, comme la scène n’était pas statique. Elle se déplaçait le long d’une artère principale du marché. Dans son sillage, elle drainait une foule de spectateurs composés de certains acteurs traditionnels du marché.

Le génie des artistes, les amenaient à intégrer tout ce qu’ils trouvaient sur leur passage, dans leur spectacle. Un taxi de passage devenait une table qui recevait un danseur. Une charrette était réquisitionnée par-ci et par-là pour amplifier un geste. Des « Katakani » ou triporteurs chargés de sacs de riz, recevaient des danseurs en plus de leur charge. Très professionnels dans ce qu’ils font, le temps de ce spectacle improvisé, tous les artistes étaient dans une seconde nature, comme envahis par une âme invisible. Ils ont tout donné et on vraiment impressionné les spectateurs de quelques minutes.

« A travers ce concept de ‘’Sougou Taa L’H ‘’, nous avons décidé d’amener l’Art dans les marchés. C’est un lieu où ont vent et on achète. Nous avons décidé d’aller vendre l’art contre le bonheur et la joie des marchandes et de leurs clients. Donc, contrairement aux autres qui y vont pour chercher l’argent ou pour avoir contre de l’argent leurs condiments nécessaires pour leurs repas, nous y sommes aller pour créer une autre vie, avec toutes les personnes qui s’y retrouvent juste le temps d’un achat ou le temps d’une vente », a indiqué Lassine Koné du Centr’Art Don Sen Folo. Selon lui, la démarche vise à rendre accessible l’art et la culture à tous.

« Vous voyez, nous aimons bien les arts. Mais, coincé au marché, nous n’avons que le petit bout de temps pour les activités sociales. Raison pour laquelle, je salue ces jeunes artistes qui sont venus d’eux même pour nous apporter un peu de bonheur et de sourire sur les lèvres. En tout, c’était beau ce qu’ils ont fait », nous a indiqué Batogoma Coulibaly, une vendeuse de légume sur l’artère du marché qui a servi de scène pour le spectacle.

Il faut dire qu’avant le Marché de Banakabougou, les artistes avaient posé leurs valises au Marché de Kalaban-Coro le 20 septembre 2017, au plaisir des marchands, marchandes et de leurs clients. Le 23 septembre 2017, ils étaient au Marché de Badalabougou.

(Toutes les images publiées ici sont des œuvres du photographe King Massassy)

Assane Koné


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