Le samedi 12 avril 2025, à la faveur de la Rentrée culturelle 2025-2026 du Groupe Koré Arts et culture ( GKAC), D^r Ousmane Sy, aimablement appelé le père de la décentralisation malienne, a partagé une de ses convictions fortes avec l’auditoire. << Le développement commence par le local. Un pays se construit à partir du local>>, a-t-il déclaré.

Dans le cadre du Kôrè Baro organisé à la faveur de la Rentrée culturelle du GKAC, D^r Ousmane Sy a été invité pour débattre du thème : << Les défis et les perspectives de la gestion des territoires locaux au Mali>>.

Pour débattre de ce thème, D^r Ousmane Sy a tenu d’entrée de jeu à partager sa conviction avec l’auditoire. Passionné par les questions locales, il dira que le développement commence par le local. Pour lui, un pays se construit à partir du local. Mais, pour cela, il dira que << tant qu’on aura pas réglé les difficultés entre les institutions locales et nationales, on aura pas encore commencé le développement>>.

Pour ce qui concerne les défis et perspectives des questions locales, D^r Ousmane Sy a été, on ne peut être plus clair. Il a d’abord fait un certain nombre de rappels.

Il d’abord voulu que tous comprennent que le Mali est un pays de diversité. Il a cité la diversité de territoires, la diversité de culture et la diversité de population. Mais, il a estimé que cette diversité mérite d’être gérée et intégrée, pour la simple raison que pour lui, la diversité n’est pas le contraire de l’unité.

Il a ensuite soutenu que nous sommes un pays de mobilité : Mobilité dans le monde de vie et mobilité dans le mode production. Il a rappelé un célèbre dicton malinké : << ni sigui ma femignebo, tama ba gnenebo>> ou si resté dans son village, dans sa contré ne règle pas les difficultés que l’on a , probablement en se déplaçant, l’on pourra les régler.

Enfin, il dira que nous sommes une nation plurielle bâtie sur le principe de l’unité dans la diversité.

Partant de ces rappels, il a fait un certain nombre de constats. Selon lui l’état fonctionne sur le modèle d’une gestion publique centralisatrice et uniformisatrice. << La centralisation n’est pas dans notre tradition. C’est une importation de la colonisation>>, a-t-il déclaré. Avant d’aller interroger notre culture qui voudrait que << Fanga ye kélégné, mara sigui Yoro ka chaa>> ou le pouvoir est unique, mais l’administration des territoires est multiple.

D^r Ousmane Sy dira que dans la logique coloniale, nous avons malheureusement voulu uniformiser l’administration de nos terroirs, alors que chaque aire culturelle veut être reconnue dans son identité.

Il a mis l’accent sur des conséquences probables de ce choix de gestion. Selon lui, depuis 1960, nous sommes installés dans une instabilité politico-institutionnelle. Pire, il dira que les territoires locaux qui se depeuplent au profit de Bamako. << Les territoires se vident et s’appauvrissent et d’année en année, Bamako devient ingérable>>, a-t-il déclaré. Avant de soutenir que nous avons fait le mauvais choix d’ un système dramatique qui appauvrit les territoires locaux. Et, comme conséquence, l’état n’arrive plus à assurer la sécurité de proximité, de telle sorte que les
communautés ont tendance à créér des systèmes d’autodéfense, même dans nos grandes villes.

Face à tout cela, il dit que le Mali fait face aujourd’hui à un certain nombre de défis.

Selon lui, le Mali doit maintenir l’unité dans le respect de la diversité de nos territoires. Parce que aujourd’hui l’intégrité du territoire est un défi. A cela, il a ajouté le defi de l’insécurité de proximité qui nous interpelle.

Mais, le plus grave selon lui, est qu’ils sont parvenus à nous convaincre de notre pauvreté. Alors que nous sommes en réalité des mendiants.assi sur des sacs d’or. << Je n’arrive pas à accepter que ce pays soit pauvre>>, a-t-il déclaré. D^r Ousmane Sy pense aujourd’hui que l’un des grands défis de notre pays, c’est comment parvenir à transformer notre potentiel national de ressources naturelles et humaines en bien être pour tous et toutes.

La réponse à cette question, a amené D^r Ousmane Sy à aborder le chapitre des perspectives. Selon lui, dans le contexte du Mali, il faut changer d’approche pour le développement. << Il faut partir du bas vers le haut. Il faut regarder le pays, à partir de ce qu’il est>>, a-t-il déclaré.

Il a aussi proposé d’ encourager et d’ accompagner les acteurs locaux dans la gestion de leur territoire. Selon lui, l’objectif final, sera de rechercher la responsabilité des acteurs locaux. << Il faut les reconnaître, les accepter et faire avec>>, a-t-il indiqué.

Mais, être beaucoup plus pragmatique, il a proposé de promouvoir la contractualisation du développement entre l’état et les territoires. << On ne peut pas développer un état avec la réflexion d’une dizaine de personnes assis à Bamako>>, a-t-il dénoncé. Avant de prendre l’exemple sur les cultures. Selon lui, les cultures ne s’administrent pas à partir de Bamako, mais à partir des territoires.

Une séance de questions réponses bien enrichissant a mis fait à ce Kôrè Baro d’une densité exceptionnelle.

Assane Koné