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MANDEN : Ces sites que le Mali souhaite inscrire sur la liste du Patrimoine mondial
mardi 25 octobre 2016, par
Le Mali entend inscrire quatre de ses sites : la Case sacrée (Kamablon) de Kangaba et sites associés sur la liste du Patrimoine mondial. En vue d’une meilleure protection du site, il est important de prendre des mesures appropriées afin d’exproprier les nouveaux acquéreurs car la terre appartient à l’état et les alentours de cet important site culturel et naturel doivent être protégés. La zone de la vallée peut servir, par exemple, de parking ou d’espace de détente pour les visiteurs du site.
Le Mali à l’intention de faire inscrire quatre de ses sites : Case sacrée (Kamablon) de Kangaba et sites associés incluant le site historique de Kurukan Fuga à Kangaba, l’Arche de Kamandjan et la case sacrée de Kéniéro sur la liste du patrimoine mondial. Un atelier sur le processus d’élaboration du dossier de proposition d’inscription sur la Liste du patrimoine mondial vient de se tenir à Siby le 22 et 23 octobre. L’atelier visait à préparer le dossier d’inscription en série des sites sur la Liste du patrimoine mondial. Il est rappelé que tous les quatre sites, situés au sud du Mali dans l’aire culturelle du Manden, sont étroitement liés à la naissance et au développement de l’Empire du Mali.
Aux regards de leur importance à la fois historique, culturelle, architecturale et économique, la case sacrée de Kangaba ou le Kamablon et le site de Kurukan Fuga sont classés dans le patrimoine culturel national du Mali respectivement par décret N°05-547/P-RM du 20 décembre 2005 et par décret N°09-402/P-RM du 31 juillet 2009. En outre, ces deux sites du Mali sont inscrits sur la Liste indicative de l’Unesco en 1999 (Kamablon de Kangaba) et 2009 (Kurukan Fuga). La case sacrée de Kéniéro et l’Arche de Kamadjan sont inscrits respectivement à l’inventaire par Décision N°09-000173 / MC - SG du 12 octobre 2009 et par décision N°10-000114 / MC - SG du 17 juin 2010.
Dans ce numéro, nous vous présentons les différents sites dont les dossiers seront présentés à l’Unesco.
La case sacrée de Kangaba (ou le Kamablon de Kangaba), dont la construction remonterait à 1653, serait le dernier en date des Kamablon de l’aire culturelle du Mandén. Situé magnifiquement au cœur de la place publique (bara) de la ville de Kangaba, le Kamablon, case sacrée de Kangaba, est un édifice de plan circulaire construit en terre (banco) et couvert d’un toit conique de chaume. Elle mesure 4 m de diamètre pour 5 m de hauteur. Ses murs sont élevés en briques crues recouvertes d’un crépi en banco. L’édifice est associé à des éléments sacrés qui l’entourent. Ces éléments sont : le puits, les trois plantes (fromagers), le terre-plein carré appelé « wasi », la tombe de Mansa Sèmè, fondateur et premier prêtre de la case sacrée et les piquets de régulation des mœurs.
La case sacrée de Kangaba apporte un témoignage historique typique non seulement de l’architecture traditionnelle en milieu soudanais (en terre de plan circulaire avec un toit conique de chaume), mais aussi la cohésion sociale entre l’ensemble des communautés du Mandén. Tous les éléments du Kamablon (les murs, le toit, les portes et les nombreux ornements sur les murs) et tous les objets qu’il abrite sont pleins de symboles et significations sur l’histoire, la philosophie, la religion et la vision du monde de ses détenteurs.
La réfection septennale du toit de la case sacrée de Kangaba est un véritable chef-d’œuvre du génie créateur humain à travers le regroupement des clans fondateurs de l’empire du Mali, de l’ensemble des populations du Mandén et des hommes de caste, notamment les griots (maîtres de la parole) du patronyme Diabaté du village de Kéla, situé à 6 Km au sud-ouest de Kangaba.
Ces griots viennent évoquer l’histoire la plus profonde et les traditions et expressions culturelles (contes, légendes, épopées, mythes, proverbes, chansons, etc.) du Mandén.
Le caractère sacré de cette réfection et la déposition de la tradition par un clan qui les conserve jalousement leur ont conféré leur persistance, leur résistance aux changements et leur authenticité. D’où l’inscription de la réfection septennale du Kamablon, Case sacrée de Kangaba, sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité en 2009. La dernière réfection de la toiture du Kamablon de Kangaba a eu lieu en 2011. Il faut noter aussi que la case sacrée de Kangaba est classée dans le patrimoine culturel national du Mali par Décret N°05-547/P-RM du 20 décembre 2005 et dans le patrimoine culturel immatériel du Mali (Décret N°2011- 237/ P-RM du 12 mai 2011).
Malgré son importance du point de vue historique, scientifique, touristique et culturel, la case sacrée de Kangaba fait l’objet d’interventions inappropriées. En effet, la case sacrée et les éléments qui leur sont directement associés sont construits respectivement au cœur de la ville de Kangaba sans dispositifs sécuritaires, pouvant la mettre à l’abri des menaces anthropiques (pression démographique, urbanisation anarchique, passage des piétons et des véhicules), de l’érosion et de la divagation des animaux domestiques.
Le Kurukan Fuga
Kurukan Fuga est une élévation de bowal, une vaste clairière s’étendant sur 32 ha. Il est situé entre le village de Keniélen à l’ouest et la ville de Kaaba, plus connu sous le nom de Kangaba, au cœur du Mandén à 90 km de Bamako.
C’est sur ce site historique que l’empereur du Mali, Soundiata Kéïta, après sa victoire sur Soumangourou Kanté, Roi du Sosso, lors de l’historique bataille de Kirina au début du 13e siècle, fit convoquer en assemblée générale les « cεkun ou hommes de tête » du Mandén, acquis à sa politique afin de leur soumettre pour approbation, après enrichissement s’il le fallait, la « Charte du Mandén nouveau ».
Le site historique de Kurukan Fuga est associé aux éléments suivants : les deux grosses pierres mythiques sur lesquelles se seraient assis Soundiata et son griot lors de la proclamation de la Charte, la place sacrée des femmes et la Charte édictée.
La Charte du Mandén, proclamée à Kurukan Fuga (ou charte de Kurukan Fuga) au 13e siècle, apparaît ainsi comme l’une des plus vieilles constitutions du Mandén ayant posé les fondements de la politique, de l’administration, de son fonctionnement et des règles de conduite des hommes et des femmes du grand ensemble mandingue. Ainsi, la dite charte a été inscrite dans le patrimoine culturel immatériel du Mali (Décret N°2011- 237/ P-RM du 12 mai 2011) et sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité en 2009. Le site historique de Kurukan Fuga est classé dans le patrimoine culturel national du Mali par Décret N°09-402/P-RM du 31 juillet 2009. Il est aussi inscrit sur la liste indicative de l’UNESCO en 2009.
Aujourd’hui force est de reconnaitre que le site fait l’objet de menaces.
Le site historique de Kurukan Fuga a une valeur historique, culturelle et touristique très avérée. Malgré les dispositifs législatifs de protection, le site historique de Kurukan Fuga est menacé à cause des pressions anthropiques (piste de passage pour véhicules, présence des champs de culture sur le site et son utilisation comme parc animaliers). En outre, le site de Kurukan Fuga ne dispose pas d’un plan de gestion et de conservation formellement établie.
La Case sacrée ou Kamablon de Kéniéro
Haut d’environ cinq mètres avec trois mètres de diamètre, ce sanctuaire, de forme circulaire et construit par Naba Diola Keita, communément appelé Mansa Diola Keïta vers 1500 après JC, est couvert d’un toit conique de chaume. La case comporte deux portes à l’Est et l’Ouest. Ses murs élevés en briques crues recouverts d’un crépi en banco, mesurent environ deux (2) mètres de hauteur. Cette case serait l’une des plus vieilles en date des Kamablon du Manden.
Le secret de cette tradition de cases sacrées dans le Manden aurait été transmis par Kamandjan Camara aux clans Kéita, lors du premier Conseil de guerre, tenu vers 1232 sur l’Arche de Kamandjan à Siby. C’est pourquoi, les cases sacrées du Manden portent généralement le préfixe « Kama » du nom de Kamandjan. Tous les éléments (les murs, le toit, les portes et les nombreux ornements sur les murs) et le mobilier que le Kamablon de Kéniéro abrite sont pleins de symboles et significations sur l’histoire, la philosophie, la vision du monde et la religion.
La réfection septennale de la toiture du Kamablon de Kéniéro est un véritable chef-d’œuvre du génie créateur humain à travers le regroupement des clans fondateurs de l’empire du Mali, de l’ensemble des populations du Mandén et des hommes de caste, notamment les griots venant de Niagassola, (République de la Guinée) du patronyme Diabaté, pour évoquer l’histoire la plus profonde et les traditions et expressions culturelles (contes, légendes, épopées, mythes, proverbes, chansons, etc.) du Mandén.
La dernière réfection de la toiture du Kamablon de Kéniéro a eu lieu dans la deuxième semaine du mois de Mai 2014.
Les sites associés à la Case sacrée de Keniéro sont : la tombe de Mansa Diola Kéita et la place publique du village.
La case sacrée de Kéniéro est inscrite à l’inventaire par Décision N°09-000173 / MC - SG du 12 octobre 2009.
Malgré son inscription à l’inventaire, le Kamablon de Kenioro est, de nos jours, soumis à des menaces d’ordre naturel et anthropique. Les constats suivants se dégagent : Les abords immédiats du Kamablon sont occupés par des constructions à usage d’habitation ; les rues d’accès à la Case sont très étroites ; la place qui abrite la Case est exiguë ; la tombe de Mansa Diola n’est pas aménagée.
L’arche de Kamadjan
L’Arche de Kamandjan, communément appelée « Kamandjan donda na bôda » (Porte d’entrée et de sortie de Kamandjan), est située à environ quatre kilomètres au nord-ouest du village de Siby. Il s’agit d’un paysage culturel et naturel, une véritable arche sculptée dans du grès, surplombant un massif de granite gréseux qui servait de muraille de protection pour le village de Siby.
Selon la légende, l’Arche est attribuée à Kamandjan Camara, un des lieutenants de Soundiata Kéita, qui l’aurait, par démonstration de puissance et de pouvoirs occultes, face à Soumaoro Kanté, Roi du Sosso, sculpté d’un seul coup de sabre le massif granitique afin de frayer un passage pour ses troupes. Cette action sublissime a redouté Soumaoro Kanté et l’amena à renoncer à la bataille contre les troupes de Kamandjan Camara. Elle reste fortement gravée dans la mémoire des populations du Manden. L’Arche est non seulement le témoignage de l’héroïsme et de la puissance tutélaire de Kamandjan, mais aussi la détermination de ses troupes à vaincre Soumaoro.
Site mixte (naturel et culturel), l’Arche de Kamandjan est le symbole des clans Camara du Manden. Elle a abrité des événements majeurs (réunions de troupes, conseils de guerre, démonstrations de connaissances occultes) pour la formation et l’épanouissement de l’Empire du Mali.
Vers 1232, s’est tenu sur le site de l’Arche, sous l’égide de Kamandjan Camara, le premier Conseil de guerre de Soundiata Kéita en exil, auquel dix chefs de guerre du Manden et leurs alliés ont participé. Le site de l’Arche a servi également à préparer la cérémonie d’investiture de Soundiata Kéita après sa victoire sur Soumaoro Kanté, en 1235, lors de la bataille de Kirina.
Les sites associés à l’Arche de Kamandjan sont la grotte des lions, le lieu de divination et la grotte sacrée de Kamandjan, la grotte de sacrifices et le site de Telikourou.
L’Arche de Kamandjan est inscrit à l’inventaire par Décision N°10-000114 / MC - SG du 17 juin 2010.
Les menaces sont récurrentes. Malgré les dispositifs législatifs de protection, le site historique et naturel de l’Arche de Kamandjan et ses sites associés souffrent des pressions anthropiques et de l’empiètement sur la couverture végétale. Les alentours immédiats du site font l’objet de pression foncière. Une grande partie de la zone, située dans la vallée à l’est de l’Arche, auparavant utilisée comme champs par les populations, a été vendue et construit par les propriétaires fonciers.
En vue d’une meilleure protection du site, il est important de prendre des mesures appropriées afin d’exproprier les nouveaux acquéreurs car la terre appartient à l’état et les alentours de cet important site culturel et naturel doivent être protégés. La zone de la vallée peut servir, par exemple, de parking ou d’espace de détente pour les visiteurs du site.
Il est à noter que c’est seulement 4 sites du Mali qui sont inscrits sur la liste du patrimoine mondial. Il s’agit : les villes anciennes de Djenné et de Tombouctou, la falaise de Bandiagara et le Tombeau des Askia.
Amadou Sidibé
(avec la DNPC)}
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