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Fatoumata Keita, écrivain a Korè Baro : « Lutter contre le terrorisme, c’est d’abord barrer le chemin à toute forme de radicalisation religieuse »

dimanche 3 mai 2015, par Assane Koné

Dans le cadre de la rentrée culturelle du Centre culturel Kôrè de Ségou, Fatoumata Keita, écrivain-auteur, a animé le samedi 25 avril 2015, à Sébougou, le 24e « Kôrè Baro » ou Café littéraire, sur le thème : « Crise sécuritaire et violence au Nord du Mali ».

Comment réunifier, réconcilier les cœurs sans donner une place importante à la notion de justice et de réparation des dommages crées ? Cela fuit la grande préoccupation de Fatoumata Keita le 25 avril 2015 à Ségou, lors du Korè Baro.

Fatoumata Keita a indiqué que son livre édité par la Sahélienne est le fruit d’une étude réalisée grâce à un appui financier du Conseil pour le développement de la recherche en sciences sociales en Afrique à Dakar (CODESRIA).

Elle a rappelé qu’en 2012, le Mali a connu une grave crise qui a porté atteinte à sa laïcité et à son intégrité. « Cette crise a vu les trois régions du septentrion malien occupées par les groupes armés islamistes et séparatistes », a-t-elle indiqué. Avant d’ajouter que durant cette occupation, des violences ont été perpétrées sur les populations.

« Cette étude fait l’état des types des violences perpétrées, après avoir analysé leur mode de fonctionnement et les raisons pour lesquelles celles-ci étaient exercées sur les populations », a-t-elle indiqué.
Après des explications sur la méthodologie de recherche utilisée, Fatoumata a indiqué que l’étude a été faite dans deux régions du Nord du Mali : Tombouctou et Gao. « Elle n’a pas pu être effectuée à Kidal », a-t-elle précisé.

L’allégement du dispositif militaire au nord a joué un rôle dans l’effritement de l’Etat

En ce qui concerne l’effritement de l’Etat au nord, elle accuse l’allègement du dispositif militaire au Nord du Mali qui a favorisé le développement d’une économie de drogue à travers AQMI. Elle a aussi, mis un accent sur l’intrusion sur le sol malien de troupes armées rentrées du front libyen et la déconfiture du système de défense malien face aux forces rebelles associées au forces venues de l’extérieures du Mali. Elle a aussi pointé un doit accusateur sur la déconfiture avérée du système de défense malien face aux forces rebelles associés aux forces venues de l’extérieur du Mali et la désertion de la plupart des représentants de l’Etat que l’occupation.

Fatoumata Keita pour fixer les mémoires dira que les acteurs de l’occupation du nord du Mali sont : le Mouvement de libération de l’Azawad (MNLA), les islamistes aussi appelés djihadiste que sont Ançar ad Dine, le Mouvement pour l’unicité du djihad en Afrique de l’ouest (MUJAO), Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) et de Boko Haram.

Au titres des conséquences de l’occupation sur les populations du nord du Mali, elle dira que plusieurs formes de violences ont été perpétrées sur elles, notamment les violations, perquisitions de domiciles, les viols, les flagellations, les séquestration, les amputations, les lapidations, les pillages et les homicides. « Cette étude pose la question globale du statut des violences perpétrées pendant l’occupation du Nord du Mali », a-t-elle indiqué. Avant d’ajouter qu’elle cherche à identifier toute forme de violence physique, quel qu’en soit l’auteur, dès lors qu’elle a été perpétrée sur les personnes de Tombouctou et de Gao, hommes et femmes. Par cette étude, j’ai voulu analyser le mode de fonctionnement de la violence, les raisons pour lesquelles les violences étaient perpétrées sur les populations, les instances de perpétration de la violence, les détenteurs du monopole de la violences, le lien entre la faute commise et le type de violence appliqué comme sanction et les types de violences perpétrés.

Mais, avant, elle dira que la violence en un sens large est toute forme de contrôle social qui barre une aspiration, impose des opinions ou des comportements, perturbe une trajectoire sociale ou cadre de vie. « En partant de cette définition, on peut affirmer que l’occupation du Nord du Mali par les groupes armés a été marquée par la perpétration d’une série de violences sur les populations du septentrion malien. Car les groupes armés, ont imposé, à celles-ci, sous peine de sanction, des modes de vie et de comportement auxquels la majorité d’entre elles ne consentait pas ».

Anarchique pour le MNLA, la violence a été structurée dans les groupes islamistes

En ce qui concerne le mode de fonctionnement de la violence, elle dira que du côté du groupe séparatiste MNLA, le mode a été anarchique. Pour les groupes islamistes, elle a fait remarquer que le mode a été structuré et réglementé. « Au niveau des groupes islamistes, une raison était donnée à l’exercice de la plupart des types des violences. Ils s’étaient dotés d’instances de régulation pour la perpétration des violences que sont : la police islamique, la brigade AHESBA, les commissariats de femmes », a-t-elle indiqué.

En ce qui concerne le détenteur du monopole de la violence, Fatoumata keita a fait remarquer qu’au début de l’occupation, le monopole de violence était détenu par le MNLA. Puis, les groupes armés islamistes se sont organisés et ont fini par le récupérer, grâce à l’appui des populations », a-t-elle rappelé. Selon elle, dès cet instant, ces groupes sanctionnaient toute autre violence parallèle et/ ou isolée perpétrée en dehors de leur contrôle. « Les islamistes ont durablement eu le monopole et le contrôle de la violence », a-t-elle déclaré. Avant d’ajouter que c’étaient eux qui procèdaient majoritairement aux séquestrations, aux inculpations sanctionnées par les flagellations, amputations et autres formes de violence. « Ils se donnaient les moyens de contrôle de la violence en distribuant des numéros verts pour arrêter d’autres auteurs d’exactions sur les populations », a-t-elle rappelé.

Violence comme stratégie de soumission

Fatoumata keita sur la finalité des violences dira que les islamistes les ont utilisé comme stratégie d’intimidation, de terrorisassions aux fins de soumettre les populations à leur volonté. Elle a aussi indiqué que la violence a été utilisée comme politique d’occupation des lieux et comme mode de gouvernance.

Quant aux types de violences perpétrées pendant l’occupation islamiste, la conférencière a soutenu que les groupes séparatistes et islamistes ont tous les deux perpétré différents types de violences sur les populations du Nord du Mali. « Selon plusieurs personnes enquêtées, les éléments du MNLA sont les auteurs des viols, des pillages, des vols, des bastonnades, des braquages et des assassinats des premières heures de l’occupation du Nord du Mali », a-t-elle mentionné. Avant d’indiquer que ce sont les groupes islamistes qui ont battus le record de perpétration des violences. Selon elle, Ils ont régné plus longtemps que le MNLA, ont monopolisé et essayé de réglementer la violence, ont posé des interdictions en rapport au comportement habituel, vestimentaire, moral, cultuel des populations, donnant ainsi à presque toutes les violences perpétrées par eux, une raison d’être.

Après avoir indiqué que la violence était mal réglementée et son administration dépendait le plus souvent de l’humeur de son administrateur, Fatoumata keita a indiqué qu’en plus des violences physiques perpétrées publiquement, les scènes de violences quotidiennement exposées ont répandu la terreur, semé la psychose chez les populations et créé chez celles-ci une violence morale, psychologique et émotionnelle.

En guise de conclusion, elle dira que pour éviter que des violences similaires ne se reproduisent dans l’avenir, il est utile de lutter efficacement contre le terrorisme. « Lutter contre le terrorisme, c’est d’abord barrer le chemin à toute forme de radicalisation religieuse », a-t-elle précisé. Avant de dire que la réunification du Mali dont le tissu social se trouve profondément déchiré par ce conflit est capital. « Mais comment réunifier, réconcilier les cœurs sans donner une place importante à la notion de justice et de réparation des dommages crées », est pratiquement la question sans réponse que Fatoumata keita se pose. Mais, elle reste convaincue que tenter de rendre justice aux victimes de l’occupation du Nord du Mali, permettra aux cœurs affligés de s’apaiser. « Et cela est utile pour empêcher tout esprit de vengeance post-crise », a-t-elle conclu.

Assane Koné

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