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Rétrécissement du sexe : Les abidjanaises se ruent vers les produits « secret »
mercredi 12 août 2015, par
Les femmes se procurent de plus en plus les produits dénommés « secret » au marché noir pour offrir une cure de jouvence à leur sexe et satisfaire leur partenaire au lit. Une pratique qui ne va pas sans conséquences pour les utilisatrices.
Des produits baptisés « secret » ou encore « médicament de femme » pullulent le marché noir de Roxy, dans la commune d’Adjamé. Ces composés médicamenteux ont la réputation de rétrécir le vagin et procurer ainsi un plaisir inouï au partenaire pendant les ébats amoureux. Aux dires des utilisatrices, ces articles ésotériques auraient le pouvoir de maintenir l’homme au foyer et assurer l’harmonie du couple. Dès qu’une jeune fille franchisse le seuil dudit marché, ces articles insolites lui sont proposés discrètement par des vendeurs à l’affût. « Ma chérie, vient par ici, j’ai le secret », nous murmure au creux de l’oreille, Abiba, ce mercredi 12 juin. Notre interlocutrice, apparemment la cinquantaine révolue, devient prolixe vu que nous nous prêtons au jeu. Elle sort de son étal une bouteille en plastique d’environ 50 cl contenant un liquide rose. Et explique le mode d’emploi :
« on mouille du coton avec et on introduit le coton imbibé dans le sexe.Quinze minutes après, on fait sa toilette. Le résultat est net, car on retrouve une jeunesse que l’homme adore. Quand vous faites l’amour, il est content. » le produit qu’ Abiba vient de présenter est appelé « Ton pied mon pied ». Il s’agit d’ailleurs de la seule mention sur l’étiquette de la bouteille. La posologie se fait à la guise de la patiente. « Tu peux l’utiliser une fois par jour pendant le nombre de jours qui te conviennent. C’est la nouveauté venue directement du Sénégal. Ça coûte 1500 F Cfa. Si tu l’utilises, ton chéri ne va jamais partir. Il ne me reste qu’une vingtaine. », assure la vendeuse. A l’en croire, plusieurs femmes se sont arraché ce produit à la veille de leur mariage. Ce qui explique que sur un stock de 800 articles qui lui auraient été livrés au départ, il n’en reste qu’une vingtaine. Comment le vérifier ces informations ? Une jeune dame assise près de la vendeuse n’hésite pas à nous livrer son témoigne.
Attention aux infections vaginales et à la stérilité !
« Depuis que j’utilise ce secret, mon mari m’aime encore plus. Quand il me fait l’amour, ça serre bien. » A quelques pas de l’étal, une autre vendeuse guette notre mouvement. A peine prenons-nous congé d’Abiba qu’elle nous poursuit. « Moi j’ai le Chewing-gum Tarzan. C’est aussi un bon secret ; on fait la toilette avec. Ça coûte 2500F Cfa seulement ; tu ne vas rien regretter », jure-t-elle à demi-voix. Dans ce marché, n’importe qui ne vend pas les produits « secret ». Pour reconnaître une professionnelle, il faut remarquer sur son étal, des perles de toutes les couleurs. La technicienne a un regard inquisiteur comme pour deviner l’attente de la cliente. En dehors des médicaments dont elles disent qu’ils rétrécissent le sexe, les commerçantes spécialisées proposent également des gris-gris de tout acabit. L’objectif unique est de maintenir la joie du ménage.
Flora Evelyne Noba, sociologue jointe hier par téléphone explique cette ruée vers le liquide rose par le fait que les hommes préfèrent des partenaires plus jeunes. Même si elle ne partage pas ce point de vue, Flora Evelyne Noba détaille que dans l’imagerie populaire, c’est la jeune fille qui procure le plaisir. « C’est pourquoi les femmes utilisent ces produits pour maintenir leur époux dans le foyer. Elles le font aussi après plusieurs grossesses toujours dans le même but. C’est également une manière pour elles de se sentir belles et attirantes. Avec la pratique, elles gagnent en confiance. », analyse-t-elle. Néanmoins, ce fait social n’est pas sans incidence médicale, selon les spécialistes.
Muni de quelques-uns des produits, nous nous sommes rendue chez un expert de Sanofis le même mercredi. C’est tout ahuri que le praticien a dénoncé l’absence d’indication sur les bouteilles. « Nous n’avons aucune idée sur la composition du produit. Il n’y a aucune indication. Or avec le mode d’emploi tel que rapporté, rien est rassurant. Il y a une bactérie présente naturellement dans la flore vaginale qui protège contre la vaginose appelée le bacille de Döderlein. Sa présence est signe de bonne santé. Avec ces produits dont on ignore les principes actifs, on risque de détruire cette bactérie protectrice et ouvrir ainsi la porte à des infections opportunistes. », fait-il observer. L’expert n’exclut pas les pertes répétées et même le cancer du col de l’utérus chez les utilisatrices de ce produit.
Dans une interview accordée à un quotidien, Dr. Gondo Diomandé, gynécologue du Chu de Cocody a averti que « ces infections qui seront jugées mineures au départ peuvent prendre des allures dramatiques si elles ne sont pas traitées efficacement et peuvent mettre la vie de la femme en danger. » Selon le spécialiste, le vagin communique avec la cavité abdominale. De ce fait, l’infection peut monter au niveau du col, passer par la cavité de l’utérus, sortir par les trompes et s’étendre au fur et à mesure à d’autres parties de l’organisme. « Cette infection va donc monter dans la trompe qui va finir par se fermer. Et c’est la plus grande cause de stérilité » a averti le praticien.
Interrogé sur la pratique la semaine dernière, notre contact au ministère de la Santé et de la lutte contre le Sida a confessé la méconnaître. « C’est vous qui nous informez. C’est quoi encore cette trouvaille ? », s’est-il étonné.
Pour l’heure, la médecine admet la chirurgie esthétique vaginale ont reconnu les spécialistes contactés. L’intervention a pour but de redonner au vagin un diamètre optimal lui permettant ainsi de retrouver sa tonicité, son élasticité et donc d’améliorer aussi sa fonction, lors de la satisfaction sexuelle. Souvent, on corrige une entrée vaginale devenue trop béante, redonnant ainsi une nouvelle jeunesse périnéale, comme avant l’accouchement, ont-ils ajouté à cet effet. Mais selon le témoignage d’un gynécologue du Chu de Cocody, cette pratique n’a pas empêché le divorce chez l’une de ses patientes. C’est sans doute pour cela que notre sociologue conclut que « la satisfaction sexuelle seule ne suffit pas pour maintenir un couple en harmonie. Le couple peut trouver un palliatif en changeant de position au lit, au lieu d’avoir recours au rétrécissement du sexe de la femme » A bon entendeur….
Nesmon De Laure
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