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Gouvernance du secteur de la sécurité : Quelle place dans la nouvelle constitution du Mali ?

lundi 21 août 2023, par Assane Koné

Dans le cadre de la mise en œuvre de son programme au Mali, DACAF a soutenu deux chercheurs maliens qui ont produit une note de recherche intitulée « Analyse des dispositions constitutionnelles de gouvernance du secteur de la sécurité au Mali ». Le lancement de ladite note a eu lieu le jeudi 17 août 2023 à l’hôtel Azalai (ex Salam) avec toutes les parties prenantes.

La présentation de cette note de recherche a été faite par Dr Kalilou Sidibé et Dr Fousseyni Doumbia, en présence de Boubacar Théra, représentant du directeur pays du DCAF au Mali. La présente note de recherche vise à décrire et analyser les dispositions de la Constitution relatives à la gouvernance des secteurs de la défense et de la sécurité. Son intérêt est de produire une réflexion sur ce nouveau cadre juridique et ses implications sécuritaires en mettant en avant les opportunités et enjeux de la gouvernance/réforme du secteur de la sécurité dans un contexte de transition militaire au Mali.

Elle s’est fixée pour objectifs de décrire les dispositions du projet de Constitution relatives à la gouvernance des secteurs de la défense et de la sécurité ; de démontrer comment ces dispositions pourraient s’inscrire dans un cadre de gouvernance démocratique et efficace du secteur de la sécurité ; de faire une étude comparative entre ces dispositions et celles des constitutions antérieures du Mali et d’autres pays africains et non africains ; d’établir les liens entre la transition militaire et ces dispositions et faire ressortir les influences notables ; d’identifier les implications de ce nouveau cadre légal pour les secteurs de la défense et de la sécurité et élucider les éléments pouvant montrer une bonne gouvernance de ces secteurs et ceux en lien avec les garanties quant à la prévention des coups d’Etat ; de formuler des recommandations pour un cadre juridique propice à la bonne gouvernance du secteur de la sécurité avec les principes de transparence, de redevabilité et d’efficacité ainsi que les valeurs liées aux caractères neutre, républicain et au service d’ intérêt général et national des armées.

Devant l’assistance, les éminents chercheurs ont précisé que la méthodologie de cette note de recherche a consisté, d’abord, à faire une revue documentaire des textes législatifs et règlementaires et ensuite, l’analyse des synthèses des documents de stratégies et rapports publiés en matière de réforme des secteurs de la défense et de la sécurité pour, enfin analyser les dispositions de la Constitution relatives à la gouvernance des secteurs de la défense et de la sécurité en comparaison avec celles des constitutions antérieures du Mali et d’autres pays africains et non africains. Des consultations ont été également organisées avec les parties prenantes pour mieux cerner les attentes et perception.

Les dispositions de la Constitution relatives aux secteurs de la défense et de la sécurité visent-elles à améliorer la gouvernance démocratique dans ces secteurs ? Quelles sont les implications et les liens entre la transition militaire et ces dispositions ? Ce sont entre autres des questions qui ont été répondues dans ce document.

En conclusion on apprend que les secteurs de la défense et de la sécurité au Mali ont souffert de multiples dysfonctionnements liés à la faiblesse structurelle marquée surtout par l’opacité et le manque de transparence, le népotisme et un jeu d’influence d’acteurs clés qui ont particulièrement nui à leur efficacité. Les dispositions de la Constitution relatives à la gouvernance des secteurs de la défense et de la sécurité visent à transformer le secteur de la sécurité et la rendre plus performante et efficace. La période de transition militaire peut constituer une occasion espérée de dresser un état des lieux du secteur de la sécurité en vue de procéder aux changements qualitatifs. C’est en tout cas la volonté affichée par les autorités de la transition. Jusqu’à présent, cette volonté est demeurée au niveau des bonnes intentions matérialisées au travers de plusieurs textes législatifs et règlementaires adoptés depuis 2020 dont les applications concrètes et cohérentes se font toujours attendre.

La nouvelle Constitution fait l’impasse sur l’ensemble des acteurs institutionnels de la gouvernance des secteurs de la défense et de la sécurité mais l’enjeu demeure l’appropriation des principes et valeurs proclamés, l’inclusivité dans la démarche notamment celle des acteurs non formels du secteur de la sécurité. La mise en œuvre de la stratégie nationale RSS et son plan d’action 2022-2024 peut constituer un cadre formel de conduite de l’amélioration de la gouvernance démocratique du secteur de la sécurité au Mali et la nouvelle Constitution donne plus de responsabilités, plus de moyens institutionnels aux armées de rester cantonnées à leurs prérogatives, aux institutions de l’Etat, plus de devoirs et plus d’exigence vis-vis d’elles et aux citoyens, le droit et le devoir d’être acteur de cette sécurité humaine et globale.

Cette note de recherche recommande aux autorités de la transition d’introduire des mécanismes indépendants de plainte contre des pratiques contraires à l’éthique (corruption, intimidation, collision avec certains criminels…) pour restaurer la confiance entre les citoyens et les acteurs du secteur de la sécurité, de mettre l’accent sur la culture institutionnelle de l’éthique. Outre le contrôle civil démocratique des secteurs de la défense et de la sécurité, le retour de l’Armée dans les casernes signifie son désengagement total au profit des civils. Ensuite, d’adopter un cadre législatif et règlementaire sur les mécanismes institutionnels de gestion et de contrôle démocratique et la redevabilité dans les secteurs de la défense et de la sécurité, d’instaurer le contrôle démocratique des secteurs de la défense et de la sécurité au travers des contrôles parlementaires (commission de la défense et commission d’enquête), le renforcement du pouvoir judiciaire et des contre-pouvoirs de la société civile, de faire des secteurs de la défense et de la sécurité l’instrument de stabilité démocratique.

Pour DCAF Mali, elle recommande de contribuer à la diffusion et dissémination de la stratégie nationale RSS et son plan d’action auprès des organisations de la société civile et des médias, de continuer le renforcement des capacités des FDS en matière de gouvernance démocratique du secteur de la sécurité (ressources humaines et budget de la défense) et de plaider en faveur de l’adoption des textes législatifs et règlementaires relatifs au contrôle citoyen, à la transparence des dépenses et à la redevabilité des secteurs de la défense et de la sécurité.

Bintou COULIBALY


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