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Ebola, Sras, peste noire : comment meurent les épidémies ?

mardi 21 octobre 2014, par Assane Koné

Alors que le virus Ebola continue de faire des ravages en Afrique de l’Ouest, l’histoire médicale révèle l’existence de différents moyens de mettre fin aux épidémies.

L’épidémie progresse tambour battant. La fièvre hémorragique Ebola a fait déjà 4 555 morts sur 9 216 cas enregistrés dans sept pays (Liberia, Sierra Leone, Guinée, Nigeria, Sénégal, Espagne et Etats-Unis), selon le dernier bilan de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), daté du vendredi 17 octobre. Pessimiste, l’OMS s’attend à voir apparaître 5 000 à 10 000 cas par semaine à partir de décembre.

Pour autant, l’histoire des épidémies révèle l’existence de différents facteurs permettant de venir à bout de ces maladies. Voici quelques motifs d’espoir.

La résistance au virus

Les virus tuent, mais sont freinés au contact des personnes les plus résistantes. « Une épidémie s’arrête à un certain stade, notamment lorsque l’agent infectieux a procédé à la ’sélection’ des plus fragiles, indique à francetv info le professeur François Bricaire, chef du service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital de la Pitié Salpêtrière, à Paris, et coauteur de Pandémie : la grande menace. Avec Ebola, on voit que le taux de mortalité est déjà passé de 86%, au début, en Guinée, à 54% aujourd’hui. »

La résistance d’une population à un virus peut s’expliquer par de premiers cas de guérison. Ainsi, « à La Réunion, de nombreux habitants sont aujourd’hui immunisés contre le chikungunya parce qu’ils ont déjà été infectés », explique à francetv info le professeur Patrice Debré, chef de service du laboratoire d’immunologie à la Pitié Salpêtrière et coauteur de Vie et mort des épidémies.

L’évolution de l’environnement

Certaines épidémies se propagent plus ou moins facilement selon les saisons. « Au Vietnam, le Sras [Syndrome respiratoire aigu sévère] a vraisemblablement été arrêté grâce à une évolution de la température », selon François Bricaire. De même, des projections pour la fin du XXIe siècle indiquent que le paludisme aura tendance à disparaître d’Afrique de l’Ouest en raison de températures trop élevées, défavorables au parasite. Dans le cas d’Ebola, aucune incidence de la météo n’a encore été clairement établie.

Des évolutions au sein de la faune peuvent également précipiter le déclin d’épidémies. « Dans le cas de la peste noire, une hypothèse, de bonne qualité, repose notamment sur l’invasion des rats gris, moins fragiles face à la bactérie, qui ont remplacé les rats noirs et ont permis l’extinction des foyers », avance auprès de francetv info Jean-Pierre Dedet, professeur émérite à l’université Montpellier 2 et auteur des Epidémies, de la peste noire à la grippe A/H1N1.

La prise en charge des malades

La mise à l’écart de malades et l’application de règles d’hygiène préventives a déjà permis, localement, d’éradiquer Ebola de certains villages. Le virus a même disparu du Nigeria et du Sénégal, du fait de la mort ou de la guérison des malades sans autre propagation. Ce sont ces méthodes, appliquées dès l’apparition des premiers cas, qui avaient jusque-là permis de limiter l’ampleur des épidémies d’Ebola depuis 1976.

De même, en 2003, l’épidémie de Sras en Asie a pu être circonscrite grâce à une « déclaration très rapide des premiers cas par les autorités chinoises », estime Jean-Pierre Dedet. « La qualité de la structure sociale et sanitaire en Asie du Sud-Est, bien meilleure que dans les pays touchés par Ebola, a joué un grand rôle », ajoute Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale à l’université de Genève (Suisse) et codirecteur de l’ouvrage Des épidémies et des hommes, joint par francetv info.

« Dans les cas de peste au Moyen Âge, les quarantaines assuraient déjà localement la coupure de la transmission », rappelle François Bricaire. Avec plus ou moins de succès, précise Patrice Debré : « Des murailles entières ont été construites pour séparer des régions, mais des gens et des rats parvenaient malgré tout à passer par endroits. » A grande échelle, la mise à l’écart des populations est plus difficile. En septembre, la Sierra Leone a imposé un confinement de trois jours à l’ensemble de sa population, ce qui a permis de recenser de nouveaux cas, sans pour autant stopper l’épidémie. Et plus globalement, l’arrêt des liaisons aériennes n’est pas nécessairement une bonne idée.

La vaccination

Les campagnes de vaccination, quand une telle solution existe, permettent d’accroître la résistance générale de la population. « C’est la seule mesure connue qui permette de prévenir l’arrivée dune vague épidémique, rappelle Antoine Flahault. Ainsi, si 25 à 30% de la population est vaccinée contre la grippe, cela évite de nouvelles épidémies. Dans le cas de la rougeole, la barre nécessaire est bien plus élevée : 95% de la population doit être immunisée. »

« Grâce aux vaccins, la variole est éradiquée, la poliomyélite et la rougeole le sont presque totalement », indique Norbert Gualde, professeur d’immunologie à l’université Bordeaux 2, sur le site du Figaro.

Dans le cas d’Ebola, aucun vaccin ou traitement n’est encore disponible, mais les laboratoires de recherche sont sur la brèche. La Russie se dit capable de fournir trois vaccins contre le virus d’ici à six mois. Le Canada a expédié, lundi 20 octobre, des doses d’un vaccin expérimental à Genève, où il va être testé pour le compte de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Un premier essai clinique d’un vaccin par la firme britannique GSK a donné des résultats encourageants. Toutefois, le laboratoire estime que ce vaccin expérimental ne doit « pas être considéré comme une riposte première à l’épidémie en cours » car il ne pourra pas être commercialisé avant 2016.

Francetv info

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