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Cohésion sociale au Mali : L’espérance contagieuse des acteurs

lundi 16 mars 2020, par Assane Koné

Depuis 2012, à la faveur de la crise multiforme qui a secoué notre pays, la cohésion sociale est en passe d’y devenir une denrée rare. Mais, rien ne semble perdu, même si des efforts sont nécessaires.

Après, le nord du pays des conflits intercommunautaires qui ne disent pas leur nom, sont entrain de mettre la cohésion sociale à rude épreuve dans le centre du pays. Depuis des mois, voir même des années, il ne se passe de jour que des peulhs ne soupçonnent des dogons de velléités conflictuelles, et vis-versa. Comme ce fut le cas entre peulhs et Bambara. Face aux attaques multiples et meurtrières les unes que les autres, les autorités maliennes et les partenaires techniques et financiers, ne manquent pas d’occasion pour matérialiser leur engagement dans des actions qui prônent et encouragent la cohésion sociale, qui semble être la seule issue pour juguler la grave crise qui secoue le pays.

« La cohésion sociale, est toujours possible à réaliser au Mali. Nous n’avons pas encore atteint le point de non retour. Mais, il faut réconcilier les cœurs et les âmes », a déclaré Mamadou Togo, président de l’Association Guina Dogon. Avant d’ajouter qu’après avoir rencontré les différentes communautés en conflits dans leur terroir, qu’il est parvenu à la conclusion que les gens ne savent pas pourquoi ils se battent. « Et, pire, ils ne savent pas comment cette haine soudaine a pu s’installer entre eux malgré une cohabitation pacifique, emprunt d’humanisme d’une rare existence et souvent pendant des siècles », a-t-il indiqué. Pour cela, il dira que les gens se trompent énormément de cible en soutenant qu’il y a une guerre entre les peulhs et les dogons. « Entre peulhs et dogons, il n’y a pas de problème », a-t-il estimé. Avant d’ajouter qu’il y a seulement eu des terroristes qui ont eu pour guides des peulhs, dans leur combat contre l’armée malienne. « Il faut les réconcilier avec l’Etat pour mettre fin à ce conflit », a proposé Mamadou Togo, président de l’association Guina Dogon, en guise de solution. Mais, il a aussi ajouté qu’il faut envisager des solutions que tout le monde peut mettre en application, notamment le fait d’amener les gens à se réconcilier les uns avec les autres, avec eux-mêmes et avec leur famille, leur entourage, etc. Selon lui, cela constitue un passage obligatoire, avant que toute la nation puisse se réconcilier et permettre la cohésion sociale.

Il dira que du côté de l’Association Guina Dogon, toutes les dispositions sont prises pour expliquer aux dogons et aux autres partisans de la paix, qu’ils ont été instrumentalisés pour se combattre. « Aujourd’hui, au regard des conflits multiples à travers le pays, nous faisons l’affaire de l’ennemie qui veut nous diviser », a-t-il dénoncé. Avant de dire qu’un effort exceptionnel est déployé par son association pour inviter les dogons et les différentes communautés avec lesquelles, ils vivaient en parfaite harmonie, de faire des analyses objectives, sereines et à tête froide, pour ne pas suivre la voix de leur cœur, mais plutôt la voix de l’esprit.

La cohésion sociale au Mali, un devoir pour nous tous

« La cohésion sociale au Mali est possible et doit être possible à reconstruire partout où le tissu social a été ébranlé », a indiqué Abou Sow, le Président de l’Association Tabital Pulaaku. Il a estimé que le Mali, contrairement à de fausses impressions, est une nation, même si ses filles et ses fils sont aujourd’hui contraints de se donner la main, au regard de ce qui arrive à leur pays, pour préserver la paix, l’entente et l’entraide un peu partout sur le territoire, comme se fut le cas par le passé.

Il a profité de l’occasion pour lancer un appel vibrant aux différentes communautés du Mali. « Quand les populations vivent ensemble, il y a souvent des frictions qui peuvent naitre des différentes activités socioculturelles et économiques, notamment du comportement de certains ou de l’exploitations des ressources naturelles…. », a-t-il estimé. Avant d’indiquer que quel que soit la gravité des problèmes et des difficultés, qu’il faudrait à un moment donné, s’assoir, se parler pour préserver l’essentiel. « C’est ce qui nous unis. C’est ce qui fait notre appartenance commune à une même nation », a-t-il déclaré.

Il a ensuite mis un accent particulier sur ce grand amalgame qui consiste à associer tous les peulhs au phénomène du djihadisme. Selon lui, cela est très vexatoire et discrimine fortement la communauté peulh. « Aujourd’hui, pour de nombreux compatriotes les peulhs sont tous des djihadistes », a-t-il déploré. Avant de rappeler aux uns et aux autres, qu’une faute est commise par un individu ou un groupe d’individus. Et, que cela n’a rien à voir avec toute une communauté. « Seuls les auteurs de ces fautes doivent répondre de leurs actes », a-t-il ajouté.
Il a précisé que son Association est aujourd’hui disposée pour un dialogue, une concertation soutenue. « Nous allons y tenir un langage de sincérité et de franchise, pour la simple raison que ce sont les peulhs qui payent le plus lourd tribut à cette lutte contre le djihadiste », a-t-il déclaré. Par conséquent, il a lancé un appel que cessent tous les abus et les exactions contre la communauté peulh. « Il faut s’attacher à la nation et à la République. Un peulh, un bambara ou un dogon tué, c’est le Mali qui perd », a indiqué Abou Sow.

Cohésion sociale au Mali, l’engagement des structures d’Etat

Zahabi Ould Sidi Mohamed, président de la commission nationale de désarmement, démobilisation et de réinsertion (CNDDR), est plus que convaincu de la nécessité de travailler pour le retour de la cohésion sociale, seul gage sûr pour la paix dans le pays. Partant du constat que malgré que les fondements de la cohésion sociale, aient été énormément malmenés dans certaines zones du pays, il a indiqué que « la cohésion sociale au Mali, c’est possible ». Selon lui, cela reste encore possible parce que la cohésion sociale au Mali est liée à la nation Malienne, à la société Malienne. « Ce sont ces soubassements qui ont permis de tenir malgré cette crise où l’Etat est affaibli », a-t-il précisé. Avant de déclarer qu’il reste très honnêtement optimiste. « Je sais que les maliens ensemble pourront surmonter ces difficultés et que le pays va retrouver sa stabilité d’entant », a-t-il déclaré.

Cependant, pour que cela soit possible et devienne une réalité, il a estimé qu’il faille recoudre le tissu social. Et, pour cela, il a une idée spéciale. « L’Etat doit responsabiliser la société civile pour trouver des solutions là où il y a des problèmes. Il faut impliquer la population à la recherche de solutions. Et surtout faire beaucoup de communication, car c’est une responsabilité qui est beaucoup plus large et qui s’adresse à l’ensemble des maillons de la société », a-t-il proposé.

Et, c’est fort de telles propositions que Zahabi Ould Sidi Mohamed, président de la commission nationale de désarmement, démobilisation et de réinsertion (CNDDR), se veut très optimiste. « On va par moment souffrir. On va par moment se fatiguer. Mais, nous avons un grand pays avec d’énormes potentialités. On a toutes les conditions pour être un pays émergent. Et, toutes les raisons d’espérer pour un avenir meilleur », a-t-il lancé.

Cohésion sociale au Mali, des actions fortes de la part de l’Etat

Pratiquement du même avis que le président de la CNDDR, le lieutenant-colonel Malado Keita, conseiller technique au ministère de la réconciliation, de la paix et de la cohésion sociale, a estimé que certes la cohésion a été altérée au Mali, mais notre riche culture et notre diversité ethniques et le brassage culturel entre les différentes populations, peut nous aider à vivre encore ensemble. « Pour aboutir à une véritable cohésion sociale au Mali, il faut rétablir la confiance entre les populations et l’Etat à travers les forces de l’ordre et de sécurité. Et, cela nécessite, la réconciliation des Maliens entre eux », a estimé Malado Keita.

Elle a annoncé que le ministère dont il est l’un des conseillers techniques, a des programmes qui permettent de rétablir la cohésion sociale. Selon elle, une politique nationale a été élaborée afin de faire face à la réparation des victimes, de les mettre dans leurs droits et de conduire des actions de réconciliation des communautés. Aussi, pour la cohésion sociale, elle dira que la stratégie consiste à sensibiliser les populations, à œuvrer pour l’organisation de certaines activités pouvant fédérer les communautés autour d’un objectif commun. Elle a aussi annoncé des activités à l’endroit des victimes afin qu’ils puissent s’insérer dans la vie sociale et culturelle. Le Colonel Malado Keita a aussi mis l’accent sur des actions qui contribuent au retour des déplacés et autres réfugiés. Selon elle, toutes les dispositions sont mises en œuvre pour permettre le retour des populations à travers la reconstruction de forages, la reconstitution du cheptel et l’ouverture de certaines écoles.

Toujours, dans le cadre de la cohésion sociale, elle dira que le ministère a initié le programme de réduction de la violence, dont la mise en œuvre est en cours. « On ne pas parler de cohésion aujourd’hui sans qu’on puisse réellement mettre fin à ces problèmes », a-t-elle déclaré. Avant d’ajouter que plusieurs programmes et projets structurant sont prévus pour le développement et la paix au Mali.

« La population doit toujours avoir en tête que le Mali est un pays uni et solidaire, riche en diversité linguistique, ethnique et culturelle », a-t-elle indiqué. Avant d’ajouter que si cela n’est pas un atout pour réellement vivre ensemble, cela ne devait pas être un facteur de conflit.

Bintou COULIBALY


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