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OMD post 2015 : La position de la société civile malienne est là

mardi 24 mars 2015, par Assane Koné

En 2015, la communauté internationale sous l’égide de l’ONU doit en principe évaluer le chemin parcouru dans la mise en œuvre des objectifs du millénaire pour le développement. Et, comme l’humanité est loin d’avoir atteint les OMD, ce sera une belle occasion pour un nouveau départ. Dans un document , la société civile malienne regroupée dans une regroupement dénommé « Action 2015 », avec le financement de Water Aid, est parvenu à dégager sa position sur les OMD post 2015. Lisez le document dans son intégralité.

En septembre 2000, les États membres des Nations unies se sont engagés à l’unanimité à réaliser d’ici 2015 huit objectifs de développement internationaux. Ces objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) représentaient un consensus mondial sans précédent concernant la meilleure approche pour lutter contre la pauvreté. La mise en œuvre de ces OMD ont permis de lancer des bases pour réduire la pauvreté, la faim, la mortalité maternelle et infantile et élargir l’accès à l’éducation, l’eau et l’assainissement. Cependant, la pauvreté persiste dans ses multiples dimensions dans de nombreuses parties du monde et spécifiquement en Afrique ; environ une personne sur cinq personnes dans le monde vit toujours avec moins de 1,25 dollar par jour.

Dans le même temps, il y a aussi une reconnaissance croissante à aller au-delà des OMD et de réfléchir à une meilleure compréhension des causes profondes de la pauvreté. Dans la même lignée, il y a aussi une inquiétude croissante face à l’absence de progrès en ce qui concerne l’objectif de garantie de la durabilité environnementale-OMD7. OMD 7 a en outre été critiqué pour ne pas avoir été bien intégré avec d’autres objectifs et pour manquer de systèmes de mesure et de résultats tangibles. A partir de 2015, les dirigeants du monde vont prendre des décisions très importantes pour notre future lors de deux sommets intergouvernementaux :

  L’Assemblée Générale des Nations Unies en Septembre 2015 où les leaders gouvernementaux décideront les nouveaux paquets d’objectifs post-2015 qui déterminera comment le monde combattra la pauvreté lors des 15 prochaines années.
  Un grand sommet en Décembre 2015, sur le changement climatique, où les leaders gouvernementaux vont fixer de nouveaux objectifs d’action climatique

Ces décisions prises ensemble devraient jeter les bases pour relever les défis les plus urgents de la planète. Les décisions qui seront prises pendant ces deux sommets formeront le monde pour le bien ou pour le mal.

2015 est ainsi un moment crucial pour élever le niveau d’ambition, et pour encourager les décideurs à intégrer véritablement les voix des personnes les plus touchées par la pauvreté et l’inégalité dans le processus d’élaboration et mise en œuvre d’un programme de transformation qui sera axé sur les personnes et la planète. C’est une opportunité pour la société civile de demander au Gouvernement de prendre des engagements sur les thèmes ci-dessous pour créer un environnement propice pour les citoyens :

L’Eau, l’assainissement et l’hygiène : Notre vision est celle d’un monde où chacun aura accès à l’eau potable, à l’hygiène et à l’assainissement. Au Mali, d’énormes efforts sont consentis pour l’atteinte des Objectifs du Millénaire pour le Développement(OMD) en relation avec l’eau et l’assainissement. L’Eau est un élément clé dans tous les aspects du développement tant au niveau social, économique, technique qu’environnemental. Le secteur de l’AEPHA (Approvisionnement en Eau Potable, l’Hygiène et l’Assainissement) doit occuper une place différente de celle qui lui a été attribué dans le cadre existant, ou l’eau et l’assainissement ont simplement été inclus dans la thématique « Développement durable ». C’est pourquoi l’Eau doit être un point d’attention central avec des objectifs clairs et des indicateurs mesurables dans l’agenda Post-2015 en vue d’éradiquer la pauvreté et assurer un développement durable. Aussi les objectifs post 2015 doivent mieux refléter l’importance centrale de l’AEPHA dans d’autres domaines tels que la santé, l’éducation, le bien-être et la productivité économique.

Au niveau global, la société civile a mené des discussions sur l’après 2015 et fait les recommandations ci-après pour la prise en compte des questions d’eau et d’assainissement dans le nouveau cadre :
• Inclure un objectif sur l’accès universel à des services d’eau potable et d’assainissement de base en tant que droits fondamentaux ;
• Fixer l’année 2030 comme date butoir pour atteindre l’accès universel à l’eau potable, à l’hygiène et à l’assainissement dans le monde ;
• Veuillez à ce que les cibles et indicateurs relatifs à l’eau potable, à l’hygiène et à l’assainissement se focalisent explicitement d’une part sur la lutte contre les inégalités en visant en priorité les populations pauvres et défavorisées, et d’autre part sur des services durables permettant d’avoir un impact à long terme.
• Le futur cadre doit répondre aux inégalités d’accès à l’eau potable et à de bonnes conditions d’hygiène et d’assainissement en se focalisant explicitement sur la lutte contre les inégalités ciblant en priorité les populations pauvres et défavorisées.

Nous soutenons comme proposé dans le rapport du « High Level Panel of Eminent Person », l’idée que la thématique de l’eau soit reconnue comme un objectif en soi dans les prochains objectifs pour le développement.
Cette dernière demande implique que l’accès universel à une eau de qualité et à un système d’assainissement, reconnu comme un droit de l’homme fondamental, soit concrétisé au plus vite. Ceci passe notamment par l’inscription du droit à l’eau et à l’assainissement dans la Constitution et dans les lois nationales de notre pays le Mali, tout en assurant la mise en oeuvre de ce droit. En outre, Nous rappelons que le droit à l’eau est indissociable du droit à l’assainissement pour tous.
• De même, les futurs objectifs pour le développement doivent reconnaitre de façon explicite que la gestion publique de l’eau relève de la responsabilité de l’État, et qu’elle doit se faire en concertation étroite avec les citoyens. Ceci implique la mise en place de services publics de distribution et d’assainissement de l’eau assurant une participation citoyenne active et responsable.
• Inciter à rendre compte concernant les progrès obtenus en matière d’accès à l’eau potable et à de bonnes conditions d’hygiène et d’assainissement,
• Dans le but d’assurer une participation citoyenne efficace, les futurs objectifs pour le développement doivent prendre en compte l’importance de l’éducation et de la sensibilisation des populations aux thématiques de l’eau et de l’assainissement.
• Enfin, les futurs objectifs pour le développement doivent envisager de façon explicite l’importance de la préservation des ressources en eau et la gouvernance de l’eau par bassins hydrographiques impliquant une participation citoyenne active et responsable. Il est également important que l’usage de l’eau soit en concordance avec le renouvellement naturel de la ressource en eau.

Ils doivent par ailleurs prendre en compte explicitement les obstacles majeurs et les formes de discrimination auxquels sont confrontés les pauvres, les femmes, les filles et les personnes âgées ou handicapées. Il est notamment urgent de reconnaître tout le temps qui est consacré à aller chercher de l’eau – une tâche généralement dévolue aux femmes et aux filles – ou à trouver un endroit sûr pour aller faire ses besoins, et de prendre les mesures nécessaires pour y remédier.

De par sa nature même, le développement durable nécessite une approche plus globale pour évaluer les résultats et garantir la redevabilité. Le cadre post-2015 doit aussi refléter le fait qu’une proportion importante des populations les plus pauvres de la planète vit dans des pays à revenu intermédiaire, en veillant à fixer des cibles pertinentes et qui ont un sens pour tous les pays, pas seulement pour les pays en développement.

La sécurité alimentaire, nutrition et changement climatique

Une alimentation équilibrée est le socle sur lequel reposent des vies saines, des moyens de subsistance solides et durables et des économies prospères. En l’absence de ce socle, leur construction s’appuie sur des sables mouvants. Les enfants souffrant d’un retard de croissance ne peuvent grandir et se développer normalement et présentent des troubles cérébraux et un affaiblissement de leur système immunitaire. Les femmes sous-alimentées et en âge de procréer n’ingèrent pas suffisamment de fer pour alimenter leurs muscles.

La malnutrition entraîne une perte de 11 % du PIB résultant des pertes humaines, de mauvais apprentissages à l’école, d’une diminution des revenus au travail et d’absentéisme pour cause de maladie. Les mères sous-alimentées sont plus susceptibles de donner naissance à des bébés sous-alimentés, perpétuant ainsi une transmission intergénérationnelle de la pauvreté. La malnutrition affecte l’organisme, l’économie et menace l’avenir. Sa prévalence menace de nuire aux ambitions en matière de développement durable.

Le changement climatique représente un nouveau défi pour les systèmes alimentaire et agricole. Il constitue une menace majeure pour la sécurité alimentaire mondiale, le développement durable et l’éradication de la pauvreté. Il affecte les quatre dimensions de la sécurité alimentaire : disponibilité, accessibilité de l’alimentation, stabilité de l’approvisionnement alimentaire et l’aptitude des consommateurs à utiliser les denrées alimentaires en suffisance, y compris la sécurité alimentaire et la nutrition. Le changement climatique doit faire partie intégrante de l’ensemble du programme de développement afin de mener à des résultats plus durables. Le futur cadre doit prendre des mesures visant à mettre en œuvre les actions suivantes :
• accroître la productivité agricole et les revenus de façon durable ;
• adapter et renforcer la résilience face aux changements climatiques ; et
• réduire et/ou éliminer les émissions de gaz à effet de serre, chaque fois que possible.
• améliorer la productivité des petits agriculteurs et éleveurs en renforçant le soutien technologique, en mettant en place des systèmes d’irrigation à petite échelle, en développant des infrastructures rurales,
• préconiser la création urgente de partenariats multilatéraux consacrés à la réduction des pertes après récolte, à la résilience aux fluctuations des prix des matières premières, à la lutte contre les pénuries alimentaires et à la promotion des restrictions à l’exportation en cas de crise.

Pauvreté, Inégalité, Exclusion Sociale

L’ éradication de la pauvreté nécessite l’autonomisation de la population, notamment des personnes vivantes dans les situations vulnérables (femmes, enfants, jeunes, populations rurales, migrants ou personnes âgées, handicapées ou déplacées), par la croissance inclusive créatrice d’emplois décents, l’amélioration de l’accès à la protection sociale et l’adoption de mesures visant à ce que personne ne reste sous le seuil de pauvreté. La persistance de l’extrême pauvreté, l’échec à assurer la liberté d’expression et la participation, et le manque de respect pour les droits humains et leur violation systématique et généralisée (y compris les droits économiques, environnementaux, culturels, sociaux et les droits des peuples autochtones), ainsi que l’utilisation non durable à l’échelle mondiale de ressources naturelles, combiné avec le changement climatique, l’érosion des sols, la dégradation des terres, la rareté de l’eau, l’insécurité alimentaire, le manque d’accès à l’eau potable et la sécurité à long terme des ressources sont quelques-uns des principaux défis qui devraient être bien reflétés dans un cadre ambitieux de développement pour l’après-2015.

La consultation mondiale sur les inégalités menée dans le cadre de l’agenda post-2015 (www.worldwewant2015.org/) montre un certain consensus à orienter la lutte contre les inégalités à travers le cadre des droits humains. La majorité des Etats s’est en effet déjà engagée dans une série d’accords et déclarations relatifs aux droits sociaux, économiques, civils, culturels et politiques. Cette approche semble en outre offrir un cadre holistique, visant le respect de droits universels de chacun, au Sud comme au Nord, et s’attaquant aux déterminants structurels des inégalités. Les cibles et indicateurs devraient être fixés de manière à assurer que les plus pauvres soient les vrais bénéficiaires des interventions.

Le futur programme devrait avoir pour but de réduire les inégalités tout en accordant une attention particulière aux personnes les plus défavorisées économiquement et socialement. Le principe d’équité doit être associé aux principes de non-discrimination et d’égalité, pour permettre une action politique significative mettant l’accent sur les inégalités de richesse et les disparités en général, tout en soulignant l’obligation légale de lutter contre les discriminations.
Afin que la pauvreté soit éradiquée et Vu le caractère multidimensionnel de la pauvreté et des inégalités le programme pour l’après 2015 doit :
• Fondamentalement transformer l’économie pour servir les gens, et non pas les intérêts commerciaux,
• Explicitement reconnaitre le défi de l’inégalité et travailler vers la construction d’une société juste et équitable. Ceci devrait être achevé par la protection sociale,
• Obliger les gouvernements à protéger les droits économiques, sociaux et culturels de chaque individu, à travers une protection sociale universelle et adéquate reconnue.
• concevoir des objectifs, cibles et indicateurs pour assurer les besoins des communautés marginalisées, en incluant la justice du genre, et l’inclusion sociale,
• assurer que les données soient ventilées sur les questions de genre, sur les groupes marginalisés et les plus pauvres,
• Combattre les inégalités extrêmes en s’attaquant aux termes injustes des échanges, aux paradis fiscaux et à la responsabilité des entreprises,
• Faire de l’égalité un objectif à part entière, et faire en sorte que les autres objectifs, cibles et indicateurs soient explicitement conçus pour repérer les populations laissées pour compte et prendre des mesures d’incitation pour améliorer l’accès des plus défavorisés ;
• L’objectif d’égalité doit aller au-delà des inégalités de revenus, afin de s’attaquer aux causes profondes de l’exclusion et de la misère et de refléter la nature transversale de l’égalité.
• Il devrait consister en un objectif global d’égalité assorti de cibles spécifiques pour la réduction des inégalités dans différents domaines ;
• Les objectifs, cibles et indicateurs devraient être conçus de façon à réduire les inégalités et à viser les populations les plus défavorisées. Ils ne doivent pas s’intéresser uniquement aux progrès et résultats globaux ;

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