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Affaire Yahaya Sangaré/Paul Leroux : Quand un tribunal de 1re instance annule un arrêt de la Cour suprême

lundi 17 février 2014, par Assane Koné

En plus d’annuler un arrêt de la Cour suprême, un juge du Tribunal de première instance de Kati, dans une affaire immobilière, a ordonné « l’exécution provisoire de la décision qu’il a prise ». Une prérogative qui selon un spécialiste du droit ne relève aucunement de sa compétence. De quoi s’agit-il ?

Dans son audience du 3 février 2014, le Tribunal de première instance de Kati a jugé l’affaire Paul Henry Leroux Traoré contre Yahaya Sangaré dans le litige foncier portant sur un verger de plus de 8 ha situé à Samalé, dans la Commune rurale du Mandé.

Dans son verdict, le Tribunal de Kati a annulé le titre foncier n°10 617 appartenant à l’inspecteur général de police, Yahaya Sangaré au profit du TF N°4041, de Paul Leroux Traoré muté en son nom en février 2002. En plus, le juge a ordonné « l’exécution provisoire de la décision nonobstant toutes les voies de recours ».

Pour certains, « le Tribunal de Kati n’a fait qu’appliquer la loi n°001-2012 du 10 janvier 2012 qui modifie l’ordonnance du 22 mars 2000 portant code domanial foncier » et appelée loi Me Hamidou Diabaté. Celle-ci à son article 170 stipule : « au cas où par erreur, un même immeuble ou une même portion d’immeuble serait immatriculée deux fois, la première immatriculation sera seule valable par préférence à la seconde qui sera annulée par le conservateur ».

Selon un des conseils de Yahaya Sangaré, le juge a outrepassé ses compétences en prenant la décision d’annuler un TF et en faisant fi d’un arrêt de la section administrative de la Cour suprême. Pour lui, en matière immobilière, un juge civil ne peut pas annuler un titre foncier, « ce travail revient au juge administratif », a-t-il fait savoir. Et de poursuivre que même le juge de la Cour de justice de la Cédéao, qui est une instance supranationale n’est pas à mesure d’annuler un arrêt rendu par la Cour suprême d’un pays membre a fortiori un juge civil d’un Tribunal de première instance.

Dans cette affaire, la Cour suprême avait rendu l’arrêt n°260 du 11 novembre 2011, qui donne raison à Yahaya Sangaré, en tant que seul propriétaire du TF convoité. L’arrêt en question infirmait le jugement n°540 du 9 décembre 2010 du Tribunal administratif de Bamako. Il annulait aussi la décision n°10-0001/DNDC-DRDC-KKRO du 8 juillet 2010 du directeur régional des domaines et du cadastre de Koulikoro et l’acte administratif n°2002-167/MDFAF-DNDC-DRD du 15 février 2002 du directeur régional des domaines et du cadastre de Koulikoro.

Principe de non rétroactivité de la loi

Et par conséquent la loi « Me Hamidou Diabaté » qui date de janvier 2012 ne vise aucunement le TF de Yahaya Sangaré à cause du principe de non rétroactivité de la loi et surtout que l’arrêt de la Cour suprême le concernant date de 2011. Dans cette affaire, le juge de Kati a aussi ordonné « l’exécution provisoire… ». Pour le spécialiste du droit, le juge civil a une fois de plus fermé ses yeux sur les textes. A ses dires, en matière foncière, « le pourvoi est suspensif ». Et d’ajouter que dans la forme, l’exécution provisoire est contraire à la loi. C’est pourquoi Yahaya Sangaré a saisi la Cour d’ Appel de Bamako pour annulation de la décision.

Dans le fond, le conseil de l’inspecteur général de police Yahaya Sangaré, estime que le TF acquis par Paul Leroux Traoré, est un faux document « qui a été démasqué par les différentes instances du tribunal ». D’ailleurs dira-t-il, une procédure pour faux et usage de faux est en cours contre le nommé Paul Leroux à la Cour d’appel de Bamako où il doit passer aux assises.

L’ancien Garde des Sceaux, Malick Coulibaly avait en son temps tenté d’annuler le même jugement en introduisant un pourvoi devant la Cour suprême contre l’arrêt n°260 du 11 novembre 2011 dans l’affaire Paul Leroux Traoré contre le général Yahaya Sangaré. «  Celui-ci a mordu la poussière  ».

Approché par nos soins, l’inspecteur général Yahaya Sangaré, a refusé tout commentaire. Pour lui, « ce n’est pas dans les journaux qu’on rend la justice » et se demande pourquoi son adversaire Paul Leroux Traoré s’existe tant en prenant d’assaut des journaux de la place. « Il faut laisser la justice faire son travail  », a-t-il dit.
Affaire à suivre.

Alpha Fofana

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