Opinion > Les héros africains et les superpuissances de l’Agriculture

Les héros africains et les superpuissances de l’Agriculture

mardi 28 juin 2016, par Assane Koné

En s’appuyant sur son expérience en tant qu’homme d’affaire africain couronné de succès, et à la lumière des nombreux défis auxquels fait face l’Afrique aujourd’hui, Masiyiwa soutien que ce dont le continent à besoin est une nouvelle génération d’héros qui ont des idées et une vision nouvelle, et sont prêts à répondre aux défis qui pourraient déterminer le future du continent.

Avec la Banque Mondiale qui estime que le marché de l’agriculture en Afrique vaudra $1 trillion d’ici 2030, Masiyiwa explique pourquoi l’agriculture est un domaine critique pour ces héros. Dans cette opinion, il célèbre les héros de nos temps, tel que Akinwumi Adesina présentement Président de la Banque Africaine de Développement, et explique comment un nouveau prix chercher à identifier les individus Africains qui prennent le contrôle du programme de l’agriculture africaine et qui changent la réalité de l’agriculture en Afrique en la faisant passer d’une lutte pour la survie à une entreprise qui se développe.

Par Strive Masiyiwa

Pour la plupart des gens, la notion de héro évoque des images de personnes braves qui risquent leur vie pour les autres, ou des « superhéros » décrits dans des livres ou films comiques, armés de pouvoirs surnaturels. Mais ceux dont l’Afrique a besoin chaque jour sont des héros d’un genre différent – des « héros en action » qui ont des idées et une vision, prêts à relever les défis qui pourraient déterminer le sort d’un continent muni d’une masse de terre plus grande que les États-Unis, l’Europe de l’Ouest, la Chine et l’Inde réunis. C’est un vaste terrain ayant beaucoup de potentiel.

Les défis de l’Afrique sont bien connus : Une sécheresse dévastatrice détruit les cultures en Afrique orientale et australe. La chute des prix du pétrole nuit à la croissance économique dans les pays exportateurs, notamment le Nigeria. Une famine chronique menace encore un tiers de nos populations, et une pauvreté profonde laisse dans une misère extrême près de la moitié des familles sur le continent. Il faut mettre en place, d’urgence, des perspectives d’emploi pour les 200 millions de personnes qui ont entre 15 et 24 ans qui font du continent africain le continent le plus jeune du monde.

Des millions d’agriculteurs africains n’ont pas encore accès à des variétés de cultures améliorées qui augmentent les rendements. Ils ont besoin d’engrais minéraux et organiques qui redonnent vie au sol. Ils ont besoin d’accéder au crédit pour acheter des intrants agricoles. Ils ont besoin d’une meilleure information sur les opportunités de marché pour justifier leurs investissements. Alors que nous pouvons obtenir des signaux de téléphonie cellulaire pour atteindre des éleveurs de bétail Masaï, la plupart des agriculteurs africains luttent encore pour trouver un sac de semences de qualité ou une petite quantité d’engrais !

Où sont les superhéros africains qui peuvent relever ces défis continentaux ? Dans un nouvel effort pour les trouver, en avril 2016 plusieurs organisations ont conjugué leurs forces à Accra (Ghana) pour lancer le nouveau prix de l’alimentation en Afrique s’élevant à 100 000 $ (l’ancien Prix Yara). Ce nouveau prix basé en Afrique récompensera un individu ou une institution remarquable qui déploie des efforts pour changer la réalité de l’agriculture africaine en la faisant passer d’une lutte pour survivre à une entreprise qui prospère ! Nous recherchons des initiatives et innovations techniques audacieuses qui peuvent être reproduites avec excellence sur tout le continent.

Nous savons qu’il existe des superhéros africains dans notre milieu, qui font des choses extraordinaires dans le monde extraordinaire de l’agriculture, qui, je pense, détient la clé de l’avenir de l’Afrique. Nous voulons entendre parler d’eux et saluer leur travail.

Qu’est-ce que je veux dire par extraordinaire ? Je veux dire des jeunes comme l’entrepreneur ougandais, Eric Kaduru, qui a fondé une organisation visant à aider des centaines de filles déscolarisées à mettre sur pied leurs propres exploitations fruitières commerciales, ou le Dr Lindiwe Majele Sibanda du Zimbabwe, expert en sciences animales et agricoles, qui dirige un groupe de réflexion politique, qui œuvre pour s’assurer que l’agriculture africaine figure de manière très visible sur le programme mondial. Je fais allusion à des gens comme les militants communautaires qui luttent pour aider les petits exploitants agricoles à accéder aux marchés, aux inventions agro-techniques et aux innovations qui constituent le lien entre les agriculteurs et des informations vitales, et les réformateurs qui militent pour de meilleures politiques agricoles à tous les niveaux, du chef d’État aux chefs de village.

Mille milliards d’arguments en faveur de l’agriculture africaine

Pourquoi l’agriculture est-elle un champ d’action indispensable ? Pour commencer, les deux tiers des Africains travaillent dans l’agriculture, le secteur qui sous-tend la sécurité alimentaire en Afrique. Sur un continent muni de riches ressources naturelles et d’un grand capital humain, il n’y a absolument pas de raisons que les Africains importent tant de produits alimentaires provenant d’ailleurs dans le monde. Nous devrions atteindre notre auto-approvisionnement. Il s’agit d’un énorme marché et d’une massive opportunité. La Banque mondiale estime qu’en 2030 sa valeur atteindra un million de milliards de dollars américains !

Si je devais me lancer dans les affaires aujourd’hui, au vu des opportunités de marché pour les producteurs alimentaires africains et de l’incroyable dotation de l’Afrique en ressources naturelles et en capital humain, je préfèrerais l’agriculture aux télécommunications.

Voici le but et l’inspiration pour le Prix de l’Alimentation en Afrique : Lorsque nos superhéros achèveront leurs missions, chaque consommateur africain bénéficiera d’un meilleur accès à des aliments nutritifs et abordables - développés et fournis par des agriculteurs africains et des entreprises alimentaires africaines. Cela signifie de nouvelles possibilités d’emploi et des revenus plus élevés pour l’Afrique rurale. Cela alimentera une plus large expansion économique, au profit de tous et des pauvres en particulier. Ceci est quelque chose que les surchauffes et contractions des économies pétrolières ne peuvent tout simplement pas offrir.

Un prix de l’alimentation et la voie vers la prospérité

Les anciens lauréats tels que Kaduru et Sibanda sont le genre de héros dont l’Afrique a besoin aujourd’hui. Il y a tant d’autres. Par exemple, l’année dernière les dirigeants africains ont sélectionné Akinwumi Adesina, un lauréat de Yara en 2007, pour être président de la Banque africaine de développement. Un champion d’un « impact à grande échelle » dans toute l’Afrique, Adesina a été ministre de l’Agriculture et du Développement Rural au Nigeria où, parmi de nombreuses réformes, il a introduit une technologie d’avant-garde pour permettre de lutter contre la corruption et d’améliorer l’accès aux intrants pour les agriculteurs ruraux, et en particulier les femmes.

Il y a deux ans, quelques jeunes entrepreneurs du Nigeria ont lancé une nouvelle série de livres comiques mettant en vedette quelque chose d’inédit : les superhéros africains. J’espère qu’un jour nous raconterons des histoires de la vie réelle des « superhéros » du Prix de l’Alimentation en Afrique, et comment leurs exploits extraordinaires ont permis de vaincre les maux tels que la faim, les changements climatiques, la pauvreté et le chômage.

Par Strive Masiyiwa

Strive Masiyiwa, Président du Conseil d’administration de l’Alliance pour une révolution verte en Afrique (AGRA) ; Président exécutif et fondateur d’Econet Wireless.


Voir en ligne : Les héros africains et les superpuissances de l’Agriculture

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.