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Dans le désert malien, les réfugiés syriens attendent

vendredi 11 décembre 2015, par Assane Koné

A In-Khalil, minuscule localité malienne à la lisière de l’Algérie, à 300 kilomètres au nord de Kidal, une centaine de réfugiés syriens, dont de nombreux enfants, attendent de passer la frontière, officiellement fermée, pour poursuivre leur voyage vers l’Europe.

Depuis deux mois environ un millier de ces réfugiés, issus de la vaste diaspora causée par la guerre civile en Syrie, sont passés par ce hameau désertique, selon les éléments sur place de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA) qui contrôle une vaste zone du nord du Mali, rencontrés ces derniers jours à In-Khalil par le correspondant de Sahelien.com dans la région.

Le trajet de ces réfugiés passe d’abord par Nouakchott, en Mauritanie, où ils arrivent par avion, profitant de l’absence d’obligation de visa pour les Syriens dans ce pays. lls rejoignent ensuite Bassikounou, à l’approche du Mali, où se situe le grand camp de réfugiés maliens de Mbera. De là, des passeurs les transportent vers Ber, localité de la région de Tombouctou sous contrôle de la CMA. Un long voyage dans le désert les attend ensuite. De deux à quatre pick-up chargés de Syriens arrivent chaque jour en provenance de Ber à In-Khalil, où des conditions difficiles les attendent.

“On les accueille chaque jour ici,” déclare Mbareck Ould Mohamed Ali, un habitant de In-Khalil qui héberge ces réfugiés. “Il faut faire quelque chose pour ces gens, ils n’ont rien à bouffer, rien à boire.”

Il s’agit ici d’un deuxième circuit connu de réfugiés syriens passant par le Mali, celui-ci contournant entièrement la zone sous contrôle gouvernemental. Un premier circuit passant par Bamako avait déjà été révélé, après le blocage à Gao, le 16 septembre, d’un car de la société de transport SONEF chargé d’une trentaine de syriens en provenance de la capitale. Ces réfugiés s’étant avérés munis de documents de voyage – y compris des visas émis par le consulat malien à Nouakchott – les autorités avaient fini par les laisser poursuivre leur périple.

En ce moment, 87 Syriens sont sous mandat du Haut-commissariat pour les Réfugiés des Nations-Unies (HCR) à Bamako, selon une porte-parole de cet organisme. Parmi ceux-ci, 24 sont des réfugiés reconnus tandis que 63 ont demandé l’asile au Mali.

L’activité actuelle sur ce premier circuit est difficile à préciser. A Bamako, les agents de la SONEF ont renvoyé les questions vers le directeur, qui ne s’est pas rendu disponible. Joint à Gao, un officier de police n’a pas voulu répondre non plus à la question de la présence actuelle de Syriens dans cette ville.

Mais le circuit parallèle en zone CMA est, lui, bien actif, et semble transporter en ce moment un nombre important de réfugiés syriens. Leurs passeurs sont des civils, selon les autorités de la CMA, qui assurent que leurs éléments ne se font pas payer pour le passage et plutôt se chargent de les mettre en sécurité. “La CMA vient en aide comme elle peut. D’abord, en les sécurisant, ensuite en partageant le peu que ses hommes ont, sur le terrain,” déclare Almou Ag Mohamed, un porte-parole de la coordination.

Le groupe cherche aussi à gérer le flux de réfugiés afin de ne pas surcharger le village de In-Khalil. “Nous faisons de notre mieux, mais il y a beaucoup de difficultés pour les accueillir,” déclare Loumada Ould Ghanami, responsable de la sécurité de la CMA à In-Khalil. Ses éléments disent avoir demandé à leurs collègues situés à Ber d’y retenir les nouveaux arrivants – même si Haboul Hamadi, maire-adjoint de Ber joint au téléphone, dément toute présence de Syriens dans sa ville.

De plus, l’étape suivante – le passage en Algérie – est devenue beaucoup plus risquée depuis que l’Algérie a renforcé ses contrôles frontaliers, selon des chauffeurs privés rencontrés à In-Khalil. Ceux-ci n’ont pas voulu s’identifier, mais disent craindre de se faire emprisonner et de voir leurs véhicules saisis par les autorités algériennes.

Ceci laisse les familles syriennes restées en rade à In-Khalil dans une situation précaire. “Nous avons beaucoup souffert durant notre trajet. Il n’y a ni eau, ni vivres et trop de chaleur,” déclare un homme syrien, tandis que des enfants de son groupe jouent dans la rue poussiéreuse. “Les conditions du désert ne sont pas faciles, surtout celles de nos enfants. Nous lançons un appel au monde entier de nous venir en aide.”

Souleymane Ag Anara, Augustin K. Fodou
http://sahelien.com/

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