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Francis Kpatindé maître de conférences à Sciences Po Paris : « Le pouvoir militaire doit obéir au civil, et le Burkina Faso ne peut pas échapper à cette règle-là »

mardi 4 novembre 2014, par Assane Koné

L’Union Africaine, la Cédéao, mais aussi la communauté internationale, les grandes puissances, souhaitent qu’un civil dirige la transition au Burkina Faso. Le Lieutenant Colonel Isaac Zida ne va donc pas pouvoir conserver son poste de président de la transition. « Il n’aura pas le choix car l’heure n’est plus aux militaires, fussent-ils providentiels ». Selon Francis Kpatindé, maître de conférences à Sciences Po Paris qui s’est exprimé sur RFI, hier, au micro d’Olivier Rogez, « l’heure est à une démocratie beaucoup plus ouverte … ».

Francis Kpatindé, journaliste et ancien de jeune Afrique, est un fin-connaisseur de l’Afrique, le Burkina Faso. Son point de vue fait notoriété, quand il parle des pouvoirs africains. La situation au Burkina Faso ne semble pas avoir de secret pour lui. Au Burkina Faso, après la démission et la fuite de Blaise Compaoré, c’est le Lieutenant-colonel Isaac Zida qui est le choix de l’armée pour diriger la transition.

Dans cette interview de RFI, Francis Kpatindé présente l’homme qui rappelle Sankara. Le lieutenant-colonel Isaac Zida est originaire de la région de Yako dans le centre-nord du Burkina Faso, tout comme Gilbert Diendéré son ancien patron, ex-chef de la sécurité de Blaise Compaoré. Les deux hommes n’étaient pas nécessairement sur la même ligne, mais Kpatindé indique : « J’observe depuis quelques jours dans la gestuelle, pas mal de symboles qu’il faut retenir ». Dans ses interventions, il dit ostensiblement « place de la Révolution » et non pas « place de la Nation », c’est son ancienne appellation sous la révolution de Thomas Sankara. En parlant, il lève le poing comme naguère, sous Sankara. Tout cela pour vous dire qu’il y a du Sankara dans Zida, la rhétorique et le charme en moins, selon Kpatindé sur RFI.

Le lieutenant-colonel Isaac Zida a été accusé de complicité après l’incursion d’un soldat qui a ouvert le feu l’an dernier au sein du palais... ce soldat, qui a fait éruption au palais, qui a tiré. Le lieutenant-colonel Zida avait été mis aux arrêts de rigueur pendant 48h avant d’être libéré. Il avait des raisons profondes d’en vouloir à Blaise Compaoré et à son supérieur hiérarchique Gilbert Diendéré.

En face du lieutenant-colonel Zida, il y a le général Honoré Traoré, le chef d’état-major général des Armées qui est plutôt un homme, en dépit de tout, proche de Blaise Compaoré, dont il a été le premier aide de camp après l’assassinat de Thomas Sankara. Maintenir quelque part Traoré au pouvoir aurait été aux yeux de la population, perpétuer le pouvoir de Blaise Compaoré.

L’Union Africaine, la Cédéao, mais aussi la communauté internationale, les grandes puissances, souhaitent qu’un civil dirige la transition au Burkina Faso. Le Lieutenant Colonel Isaac Zida ne va donc pas pouvoir conserver son poste de président de la transition. « Non, il n’aura pas le choix car l’heure n’est plus aux militaires, fussent-ils providentiels. L’heure est à une démocratie beaucoup plus ouverte et le pouvoir militaire doit obéir au civil, et le Burkina Faso ne peut pas échapper à cette règle-là », assène le maître de conférence à Sciences Po à Paris.

Sur la présence de Blaise Compaoré en Côte d’Ivoire, Kpatindé émet des réserves : « Je pense que le fait que Blaise Compaoré soit dans un pays proche, qui est à un degré ou un autre mêlé à la vie politique au Burkina Faso, cela va être ingérable. Il va falloir sûrement qu’il se trouve une autre destination et je pense que les autorités ivoiriennes doivent y penser … Je pense pour ramener le calme, pour les problèmes de sécurité régionale, il va falloir que Blaise Compaoré, au bout d’un certain temps, se trouve une terre d’exil ». Blaise aura certainement à s’expliquer devant la justice sur certains assassinats : « Je pense qu’il y a deux niveaux où il aura à s’expliquer devant la justice de son pays ou de la justice internationale : sur certains assassinats comme celui du journaliste Norbert Zongo, du philosophe Clément Oumarou Ouedraogo mais également au plan régional, dans ses immixtions tonitruantes dans les affaires internes de la Sierra Leone, les problèmes des « diamants de sang » au Liberia… la liste n’est pas exhaustive. Sans compter le Mali, même récemment la Mauritanie, le Tchad avec Togoïmi. Blaise Compaoré était bien impliqué dans la rébellion au Tchad et j’en passe », a indiqué Francis Kpatindé. Beaucoup de chefs d’Etat de la sous-région ne parlaient pas beaucoup, n’osaient pas parce qu’ils craignaient et redoutaient les colères de Blaise Compaoré, ajoute-t-il. Maintenant, ils sont libérés, ils vont sûrement essayer de lui demander des comptes au moins au niveau de la justice.

B. Daou
(LE REPUBLICAIN)

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