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Elections communales et régionales : Des experts du ministère de l’Intérieur proposent la dissolution de la CENI de Diamoutani
dimanche 29 juin 2014, par
« A la faveur de la recomposition du paysage politique et de la prorogation du mandat des conseils des collectivités territoriales, il serait souhaitable de mettre en place une nouvelle CENI conformément aux dispositions de l’article 4 susvisé pour superviser et suivre les prochaines élections communales et régionales ». Telle est la suggestion d’un groupe d’experts du ministère de l’Intérieur et de la Sécurité, proposée au ministre Sada Samaké le 25 juin 2014. Lisez la synthèse des travaux !
SYNTHESE DE LA REFLEXION DU MINISTERE DE L’INTERIEUR
ET DE LA SECURITE SUR LA SITUATION DE LA CENI
Pour la gestion de la délicate question du maintien ou non de la CENI dans sa formation actuelle, question soumise à la réflexion des experts du Ministère de l’Intérieur et de la Sécurité, lors du cadre de concertation du 19 juin 2014, il y a lieu de mener une analyse au double plan juridique et politique pour permettre une compréhension bien partagée de la situation, toute chose qui pourrait faciliter la prise de décision acceptable par tous ou tout au moins par une grande majorité.
1. Au plan juridique :
La loi électorale sous son chapitre II et sa section 1 traite de la CENI. Il faut retenir que les réclamations et observations de la plupart des intervenants lors de la réunion du cadre de concertation sur la situation de la CENI se fondent sur l’article 17 de la loi électorale qui dispose « le mandat de la CENI prend fin trois mois au plus après la proclamation définitive des résultats de l’élection générale, d’élections générales successives ou du référendum ».
Les notions d’élection générale et d’élections générales successives qui apparaissent dans les dispositions de l’article sus visé ont été interprétées différemment par les intervenants sur la question.
Il ressort des débats deux positions :
– ceux qui réclament la démission de la CENI soutiennent que les élections
générales sont un ensemble d’élections comprenant la présidentielle, les
législatives et les communales. Le report des communales initialement prévues en avril 2014, semble justifier à leurs yeux la fin ou l’interruption d’un processus, partant, celle du mandat d’une CENI commise à ce processus, peu importe la nature et les raisons du report ;
– pour les intervenants au nom de la CENI, le parachèvement du processus engagé en 2012 justifie à suffisance la non recomposition de la CENI dont le maintien en fonction est justifié par le report et le récent financement de ses activités par le budget national.
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Entre ces deux positions, le report de la date des communales, donc finalement l’intervalle de temps séparant les élections législatives des élections communales, semble être l’élément qui pose plus de problèmes. Autrement dit, si les élections communales étaient tenues à la date initialement prévue (avril 2014), il n’est pas évident que le mandat de la CENI eût été mis à l’index avec autant d’engagement et d’arguments. Alors cette attitude relèverait plus du bon sens, de la tolérance ou du consensus politique que du droit, dans la mesure où la loi n’indique pas avec précision le temps qui doit séparer les différentes
élections.
Cependant, aux termes de l’article 10 de la loi électorale, « les membres de la CENI sont nommés par décret pris en conseil des ministres avant le début des opérations de révision annuelle des listes électorales précédant l’année des élections générales ».
Cette disposition permet de retenir que les élections communales, devant être séparées des élections générales de 2013 (présidentielle et législatives) par au moins une révision annuelle des listes électorales, devraient être précédées de la nomination de nouveaux membres de la CENI, conformément aux dispositions de l’article 4 de la loi électorale.
S’agissant de la précision à apporter à la notion d’élection générale, celle-ci se définit par rapport à l’élection partielle. Si la loi électorale ne donne pas une définition de l’élection générale, son esprit laisse comprendre qu’elle indique par « élection générale » une élection qui concerne tout le territoire en même temps, par opposition à « élection partielle » qui peut concerner une seule ou quelques circonscriptions électorales (législatives partielles ou communales partielles).
Par ailleurs, la notion « d’élection générale, de succession d’élections générales, ou de référendum » est confirmée par l’article 3 qui dispose in extenso : « La CENI est chargée de la supervision et du suivi de l’élection présidentielle, des élections générales législatives et communales et des opérations référendaires ».
Il est à remarquer qu’au niveau de l’article 3, l’expression « élection générale » est utilisée uniquement pour les législatives et les communales qui peuvent être aussi partielles, contrairement à la présidentielle et aux opérations référendaires qui sont obligatoirement générales parce qu’il n’est pas prévu de partielle pour ces scrutins.
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Donc l’élection présidentielle est une élection générale, les législatives concernant toutes les circonscriptions sont une élection générale, les élections communales concernant toutes les communes sont une élection générale. La succession d’élections générales prévue à l’article 17 ne pourrait alors désigner que la succession d’au moins deux de ces types d’élection.
S’agit-il de succession d’élections générales à intervalles irréguliers (législatives tenues trois mois après la présidentielle, communales plus d’un an, mais moins de deux ans après les législatives) pouvant justifier la non dissolution de la CENI actuelle ?
Comme pour la première phase de notre analyse, la question de durée d’intervalle revient ; mais cette fois avec la nuance que les communales sont une élection générale à part, détachable des autres élections générales que sont les législatives et la présidentielle. L’histoire encore récente de nos processus électoraux permet de constater que les élections générales tenues en 1997 n’ont pas été suivies sous le même mandat de la CENI que les communales de 1999. Il en va de même de celles de 2002 par rapport aux communales qui les ont suivies en 2004 et ainsi de suite jusqu’en 2012, mais toujours avec un intervalle de deux ans.
L’on peut alors conclure à ce niveau que, n’eût été le décalage intervenu dans le
chronogramme électoral de la présidentielle et des législatives, ces élections seraient tenues en 2012 sous un mandat de la CENI différent de celui qui aurait géré les communales en 2014.
Aussi, à titre de rappel, il faut préciser que :
– le mandat des membres de la CENI démarre avec leur nomination par décret pris en conseil des ministres avant le début des opérations de révision annuelle des listes électorales précédant l’année des élections générales ;
– aux termes de l’article 4, elle est composée au niveau national de quinze (15)
membres répartis comme suit :
• dix (10) membres désignés par les partis politiques suivant une répartition
équitable entre les partis politiques de la majorité et ceux de l’opposition
• un (01) membre désigné par les Confessions religieuses ;
• un (01) membre désigné par le Syndicat Autonome de la Magistrature ;
• un (01) membre désigné par le Conseil de l’Ordre des Avocats ;
• un (01) membre désigné par les Associations de Défense des Droits de
l’Homme ;
• un (01) membre désigné par la Coordination des Associations Féminines
(CAFO) ;
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– conformément aux dispositions de l’article 17, le mandat de la CENI prend fin trois mois au plus après la proclamation définitive des résultats des élections générales, d’élections générales successives ou du référendum. A la fin de son mandat, la CENI adresse un rapport au Président de la République. Ce rapport est publié au Journal Officiel dans un délai maximum de trois (3) mois.
3. Au plan politique :
La création de la CENI trouve sa motivation essentielle dans la méfiance de la classe politique vis-à-vis de l’administration électorale. Sa composition reflète naturellement une préoccupation par rapport à des intérêts politiques que la présence de la société civile (qualifiée de neutre) pourrait tempérer. C’est plutôt une décision politique consensuelle en la matière qui serait souhaitable au
regard du contexte politique actuel.
4. Suggestions :
A la faveur de la recomposition du paysage politique et de la prorogation du mandat des conseils des collectivités territoriales, il serait souhaitable de mettre en place une nouvelle CENI conformément aux dispositions de l’article 4 susvisé pour superviser et suivre les prochaines élections communales et régionales.
Bamako, le 25 juin 2014