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ADEMA/PASJ : Comment le C E affaiblit le parti

mercredi 26 novembre 2014, par Assane Koné

Les affaires sales du Comité exécutif du parti de la ruche ont fortement contribué à polluer l’atmosphère entre les abeilles, poussant ainsi à une série de démissions des militants de premières heures. Après la démission d’Iba Ndiaye, Oumarou Ag Mohamed Ibrahim a aussi annoncé sa rupture. Cet énième départ des militants de poids du parti, relance une fois de plus le débat sur le système de gouvernance du C E, son management des ressources humaines et le manque de démocratie interne devenue difficile à supporter pour certains camarades. Explications.

La nouvelle n’est plus qu’un secret de polichinelles, et est tombée en ce début de semaine comme une trainée de poudre. Le 4e vice-président du parti de l’Alliance pour la démocratie au Mali (Adema/PASJ), non moins membre du Comité exécutif, Oumarou Ag Mohamed Ibrahim a démissionné de toutes ses fonctions de militants. Officiellement, il a motivé la rupture par une « collaboration difficile avec certains camarades ».

Comme raison, le démissionnaire n’en dit plus. Mais les proches du président Oumarou Ag Mohamed Ibrahim explique que son choix découle avant tout d’un souci de préserver son monde politique et de ne pas l’abandonner à son sort. Cette démission intervient après celle de l’ancien président par intérim du parti Ibrahima Ndiaye, qui à son tour a défendu sa thèse par de série d’évènements malheureux depuis de nombreuses années. « Le soutien sans faille de l’Adema à la politique actuelle conduit par IBK est aujourd’hui la principale raison de ma démission », a-t-il avancé.

Au sein de la formation politique, le départ des cadres de poids hante les esprits. Cependant, précisent-ils nous respectons la décision des camarades même s’ils n’en partagent pas l’opportunité.

Pour le secrétaire général de la section VI, Aboubacar Sangaré, il s’agit d’une grosse perte. En revanche, pense-t-il, on ne démissionne pas d’un parti pour des raisons personnelles. « Une lutte politique se mène autour des valeurs et des principes démocratiques. Dans un parti, on ne s’identifie pas à une personne, mais à des convictions. Malheureusement, je doute que ces démissions soient prises en tenant compte de cette dimension. Encore, faudrait-il préciser que la section VI respect la décision des ainés », nous a expliqué, dans une interview.

Pour d’autres militants du parti, la série de démissions n’est pas surprenante au regard de l’atmosphère de travail devenue assez tendue. C’est du moins ce qui ressort de l’avis de ce jeune responsable de Kalaban-Coro.

Boubacar Keita de la section de Kalaban-Coro, de faire reconnaitre que la démission des deux ténors constitue une grosse perte, et intervient à un moment difficile de la vie du parti. « Nous prenons acte de la décision, et notre défit est de travailler pour combler le vide qu’ils ont désormais laissé », indique notre interlocuteur.

Le grand gâchis !

Les militants et les observateurs politiques sont unanimes : le départ d’Ibrahima Ndiaye et Oumarou Ag Mohamed Ibrahim est un coup dur à la ruche. Nul n’est indispensable certes, mais les deux personnalités constituaient un maillon essentiel du parti Adema. Reconnus « bosseurs » par les militants du parti, l’ex-président par intérim et le 4e vice-président du parti restent des artisans de la forte implantation du parti dans leurs fiefs respectifs.

Aujourd’hui sans démagogie, les abeilles leur doivent cette reconnaissance. S’ils les faisaient sans doute pour eux-mêmes par devoir de militant, ils croyaient aussi aux idéaux du parti et à la responsabilité des hommes qui les incarnent.

Si personne, parmi nos interlocuteurs, ne semble faire le lien de ces démissions avec le comportement de certains responsables du parti, tout porte à croire que les relations entre les démissionnaires et le Comité exécutif étaient devenues depuis plusieurs années difficiles. Depuis quelque temps, les membres du C E se livrent à une guerre froide.

Au parti des abeilles aujourd’hui, plusieurs militants dénoncent certaines prises de position du C E, se faisant le parti souffre de querelles de leadership et de dysfonctionnements multiples. « Souvent nous apprenons la position du parti suite aux déclarations du C E. Après, on nous réunit pour prendre une décision commune. Sans doute, c’est pour entériner la position déjà prise par le C E. Ce n’est pas une attitude démocratique », nous confie un responsable du parti. Et d’ajouter que les épreuves redoutables sont venues affaiblir davantage une organisation, déjà fortement ébranlée par les évènements du 22 mars 2012, de la gestion de la transition, du choix du candidat au sein de l’Adema et des élections présidentielles et législatives.

Le départ des cadres de poids de la direction du parti peut être considéré à cet égard comme un des signaux d’une distanciation progressive entre le Comité exécutif et leur responsabilité. Ce qui l’agace, comme beaucoup de camarades, c’est qu’on a souvent l’impression que c’est le C E qui gère le parti comme un patrimoine.

Le C E doit revoir ses rapports avec les camarades !

L’Adema persiste dans une allégeance inconditionnelle à la politique actuelle, et si cette politique doit rester la même, il serait difficile pour le parti de l’abeille solitaire de prospérer parmi les partis du peloton de tête. C’est du moins les démissions qui vont être déterminantes. Le choix actuel de la direction du parti risque à terme d’être suicidaire. Le comité directeur à sans doute failli. Le positionnement actuel du parti sur l’échiquier politique est une rupture avec les exigences. C’est pourquoi les valeurs sûres du parti réagissent face à une perte d’idéologie et à une dégradation en terme de crédibilité. Il s’en suit un dépérissement physique et idéologique.

De sources proches du parti, certains cadres de la direction ne comptent plus faire mystère de son agacement envers les dirigeants du parti qui ne font rien pour les aider à mieux supporter la parenthèse douloureuse qu’inflige désormais le parti présidentiel dans l’accaparement des postes jutés. Certains seraient déjà avancés dans les négociations avec d’autres familles politiques dont le maire de Bamako, Adama Sangaré. Le maire est désespérément seul, déprimé et n’est pas soutenu dans son combattant. Et même aux législatives, il a bataillé en solide pour obtenir le résultat si flatteur qui le propulsa au second tour. Là, encore le parti avait toléré pour ne pas dire encouragé la candidature de Kader Sidibé, un cadre bon teint de l’Adema.

Il n’y a donc pas de doute, le C E contribue à affaiblir le parti. L’instance directionnelle doit revoir sa copie. Son management des hommes souffre d’énormes lacunes, son comportement despotique et ses décisions incohérentes agacent les camarades. Toutes choses qui handicapent aujourd’hui la ruche de prospérer à la tête du peloton. A croire que dans ce contexte, l’ex-parti majoritaire a de possibilité de rafler la mise aux échanges communaux et régionaux, il y a de quoi rêver véritablement.

Bréhima Sogoba

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